À CETTE GUERRE des calculettes s’ajoute celle des sondages qui, selon qu’ils sont commandés par les médias plus à droite ou plus à gauche font apparaître soit la conviction du peuple que la réforme est inévitable soit qu’il est totalement hostile à cette réforme-là, avec la douce illusion que la gauche résoudrait le problème sans faire souffrir personne, sans allonger la durée des carrières, et se contenterait de taxer les « riches » en prélevant quelque 45 milliards par an sur la production intérieure, ce qui veut dire que la classe moyenne aussi paiera cher.
Une réforme, mais pas celle-là ? Si le pouvoir semble insensible aux cas particuliers, celui des femmes qui n’ont pas assez cotisé, celui du maçon qui aura passé 40 ans à trimer dur, celui du manutentionnaire qui n’a jamais pu gravir les échelons sociaux, la gauche nous chante une ritournelle dont le refrain entêtant continue de prétendre que la société française va se désendetter en travaillant 35 heures par semaine et 40 ans, pour une retraite qui durera 20 ans et plus. Le coup de baguette socialiste, c’est les années de cotisations : de toute façon, si vous trouvez un emploi à 23 ans, vous travaillerez jusqu’à 63 ans. Autrement dit, la solution miracle de la gauche ne serait pas moins dure pour les salariés que celle du pouvoir. Mais ce n’est pas vrai : le seul moyen d’aller vers l’équilibre des régimes, c’est de reporter l’âge de la retraite. Les entreprises hésiteront beaucoup à licencier un « senior » de 55 ans (en réalité un jeune home du point de vue de l’espérance de vie) s’il a besoin de sept années de plus pour toucher sa retraite. L’autre argument de la gauche, c’est que la réforme des retraites fonctionnera mieux si elle suit une réforme fiscale et si des dispositions sont prises pour l’emploi des jeunes (afin qu’ils accèdent plus vite à l’emploi) et des seniors (afin qu’ils gardent l’emploi qu’ils ont). Tout est vrai sur le papier, mais la France, en attendant ce paradis des équilibres sociaux, pourra perdre sa chemise.
Nous avons donc tous de bonnes raisons d’être inquiets parce que, entre l’exaltation du combat social paré de toutes les vertus humanistes et l’obstacle posé par l’endettement, on ne discerne pas d’espace pour la réforme. Il est impossible de dire, comme le fait le gouvernement, que les Français commencent à s’habituer à son projet. Le rejet de la réforme par la population, quel que soit le nombre des manifestants du 23 septembre, quelles que soient les décisions qu’auront prises les syndicats, quelles que soient les conséquences d’une éventuelle grève générale et reconductible, nous ferait perdre trois ou quatre années précieuses au bout desquelles un nouveau projet, celui de la gauche, prévoirait tant d’exceptions qu’il ne compenserait qu’une fraction de la dépense, aggravée par le retard. On a beaucoup joué, ces dernières semaines, à nous renvoyer aux précédents de réformes proposées puis retirées sous la pression d’une foule révoltée. L’histoire ne repasse pas les plats. Le contexte économique et financier est différent, il suffit à nous interdire toute hésitation. Un retrait indiquera au reste du monde que, décidément, les Français sont incorrigibles. Ce n’est pas que nous perdrions notre réputation comme une jeune fille dévergondée, c’est que l’Europe et les marchés, dont nous sommes dépendants, nous feront payer notre lâcheté devant l’adversité. Nous ne saurions nous soustraire à l’environnement commercial ; un accroissement de la dette détruira fatalement des emplois ; et, avant de songer à leur retraite, les jeunes qui manifestent doivent d’abord trouver l’emploi qui la leur garantira. En chargeant la barque de dépenses publiques déjà accablantes, nous détruirons notre capacité à investir. Voilà la vérité. On peut trouver énormément de défauts au gouvernement en place, on n’en frémit pas moins à l’idée de ce que ferait l’opposition si elle s’emparait du pouvoir.
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