Les délais
Il est habituel de distinguer les syndromes d’intoxication par les champignons en fonction du délai d’apparition des premiers signes par rapport à l’heure d’ingestion. On distingue ainsi les délais dits courts (moins de 6 heures) et les délais dits longs, les symptômes apparaissant en plus de 6 heures. Cette distinction a pour objectif de permettre rapidement l’évocation d’un syndrome phalloïdien qui impose la mise en œuvre d’une réanimation hydroélectrolytique. Cette règle peut être difficile à appliquer en cas d’ingestion de champignons lors de plusieurs repas ou de consommation d’un mélange de plusieurs espèces.
Six syndromes précoces
La grande majorité des intoxications est caractérisée par des syndromes précoces. Ils sont au nombre de six :
• le syndrome gastro-intestinal, le plus fréquent, est caractérisé par des troubles digestifs avec déshydratation. Il survient après ingestion de champignons comestibles mais ingérés crus (amanites comestibles) ou est provoqué par les toxines présentes dans certains champignons ;
• le syndrome muscarinien, ou sudorien, est le plus fréquent en réanimation. La muscarine est présente dans une quinzaine de clitocybes. Il est caractérisé par des troubles
digestifs, une hypotension et une bronchoconstriction. Il impose une réanimation parentérale et un traitement atropinique ;
• le syndrome panthérinien, ou « anticholinergique », est le 3e par ordre de fréquence. Il est lié à la consommation d’amanites tue-mouches, panthère ou jonquille. Il associe des troubles digestifs et des troubles du système nerveux central (agitation, délire, hallucinations, somnolence) ;
• le syndrome narcotinien ou psilocybien résulte de la consommation volontaire de certains champignons hallucinogènes, des psilocybes. Il associe euphorie, distorsion du temps et de l’espace, hyperesthésie, hallucinations, troubles de la vision des couleurs, modifications de l’humeur, mais aussi angoisse, confusion, violence, céphalées, vertiges, troubles digestifs, mydriase, tachycardie, hypertension. À fortes doses, convulsions et coma sont possibles. Il impose repos, sédatifs et prise en charge psychiatrique ;
• le syndrome coprinien ou antabuse, rare, est produit par une toxine présente dans le coprin noir d’encre ou le paxillus enroulé. Les symptômes apparaissent en cas de prise d’alcool : flush, malaise, céphalées, sueurs, tachycardie, hypotension. Des troubles du rythme, un collapsus sont possibles. Le risque persiste de 3 à 5 jours après ingestion du champignon ;
le syndrome paxillien, exceptionnel, se traduit par une hémolyse intravasculaire aiguë d’origine allergique.
Trois syndromes à délai long
• Parmi les syndromes à délai long, le syndrome phalloïdien, lié à l’ingestion d’amanite phalloïde, est le plus redouté. Il associe agression digestive majeure et cytolyse hépatique. L’insuffisance hépatocellulaire, qui survient au 4e-5e jour, peut aller jusqu’à l’hépatite fulminante. La mortalité est de 15 à 20 % ;
• le syndrome orellanien est dû aux cortinaires. Il s’agit d’une insuffisance rénale aiguë apparaissant en 4 à 14 jours, qui peut évoluer vers une insuffisance rénale chronique ;
• le syndrome gyromitrien, rare, est provoqué par les gyromitres. Il associe des troubles digestifs à des troubles neurologiques (confusion, délire, somnolence, convulsions). La gravité est liée à la survenue d’une hépatite fulminante, d’une hémolyse et d’une atteinte rénale.
Six nouveaux syndromes
• Le syndrome prosimien réalise une atteinte rénale qui guérit sans séquelles. Il fait suite en France à l’ingestion d’amanite proche. Le traitement est symptomatique ;
• un cas d’encéphalopathie par ingestion d’Hapalopilus rutilans a été décrit dans une famille.
• par ailleurs, 12 cas de rhabdomyolyse dont 3 décès sont survenus en France lors de la consommation massive de Tricholoma auratum, connu sous le nom de bidaou. Les signes associent des myalgies diffuses qui prédominent à la racine des membres, parfois des sueurs sans fièvre. Le bilan confirme la rhabdomyolyse massive. La guérison peut survenir en quelques jours. Dans les cas défavorables surviennent une dyspnée, une myocardite et un collapsus.
• le syndrome acromélalgien est un acrosyndrome douloureux mimant une érythermalgie. Cette intoxication est connue au Japon depuis la fin du XIXe siècle. En France, elle fait suite à l’ingestion de clitocybes amoenolens, qui poussent en montagne à plus de 1 000 m d’altitude.
• une encéphalopathie convulsivante de 1 à 3 semaines après ingestion de Pleurocybella porrigens, espèce réputée comestible, est survenue sous forme d’épidémie au Japon en 2004 chez 60 insuffisants rénaux. Quinze malades sont décédés.
• un syndrome cérébelleux faisant suite à la consommation de morilles a été reconnu en 2006. Il est résolutif en 12 heures. Le rôle de la quantité ingérée et de la cuisson a été évoqué.
Références
(1) Saviuc P, Danel V. New syndromes in mushroom poisoning. Toxicol Rev 2006 ; 25 : 199-209.
(2) Harry P, Pulce C, Saviuc P. Toxidrome neurologique et ingestion de morilles (Morchella sp.). 45e Congrès de la Société de toxicologie clinique (Bordeaux, 6-7 décembre 2007).
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