Serial-séducteur
« La Vie sexuelle d’un Américain sans reproche » (1), consacrée à John Fitzgerald Kennedy, s’ajoute à une longue liste d’ouvrages de non-fiction qui ont déjà été écrits sur le « sujet » – le terme est de l’auteur – et, pourtant, capte notre attention. On a tous en mémoire la vie du 35e président des États-Unis, qui est passé dans les années 1960 tel un météore, entré en fonction en janvier 1961, à l’âge de 43 ans, et assassiné le 22 novembre 1963. Mais le propos de Jed Mercurio n’est pas de livrer une nouvelle biographie. Sur fond de guerre froide et de crise de Cuba, de stars hollywoodiennes et d’enquêtes de la CIA, il se penche sur le mystère du plus populaire des présidents américains, qui fut aussi un serial-séducteur faisant feu de tout bois, de la starlette à la stagiaire, en passant par la prostituée, sous le regard complaisant de son entourage et celui pour le moins ambigu de la First Lady.
Pourquoi un tel appétit sexuel ? Jed Mercurio, qui a obtenu son diplôme de médecine à l’université de Birmingham et a ensuite exercé pendant quatre ans avant de devenir, par le hasard d’une annonce passée dans un journal médical, scénariste pour une série télévisée et de se consacrer à l’écriture, creuse, dans ce premier roman traduit en français, la piste médicale. On n’en dévoilera pas plus que les prémices annoncées par la simple remarque : « Depuis la fin de son adolescence, le sujet souffre d’accumulations qui deviennent toxiques si elles ne sont pas évacuées »... Laissant découvrir les remèdes conseillés et prescrits par celui qui est justement surnommé « Dr Feelgood ».
Antidouleurs, somnifères, amphétamines et le reste, sans oublier un corset, qui, parce qu’il l’empêchera de se baisser au moment de l’attentat, causera sa perte, le dossier du patient est bien rempli ! Reste que Jed Mercurio, entre provocation et réalisme, donne une image inattendue d’un personnage mythique qui redevient ici humain, trop humain.
Trois petites notes de musique
Autre personnage de légende dont l’œuvre nous réjouit le cœur, Mozart. Après que sa vie a inspiré pléthore de pages et d’images, c’est aujourd’hui Claude Mossé, auteur de plus de 40 ouvrages qui ont mis l’histoire à la portée de tous, qui s’empare du mythe dans un roman au titre alléchant, « le Secret de Mozart » (2).
Ce secret est-il pure invention ? L’auteur nous entraîne dans les années qui ont précédé la Révolution française, à la cour de France avec la reine Marie-Antoinette et à la cour des Habsbourg avec Mozart. Tous deux sont nés en Autriche, mais il n’y a pas que cela qui les rapproche. Claude Mossé rappelle que l’enfant prodige aurait promis, lors d’un concert à Versailles, une symphonie au futur roi de France. Que faut-il entendre derrière les notes ? Un roman situé entre vérité historique et espionnage romanesque, assorti d’un jeu sur le site de l’éditeur...
L’art et la guerre
Un musicien encore, Beethoven, et un artiste également fameux, Goya, sont au centre du dernier livre d’Alain Casabona, à qui l’on doit des nouvelles (« Histoires à dormir Dubout »), un roman (« le Grenier aux merveilles ») et d’avoir réhabilité en 2002 l’atelier de Pablo Picasso, rue des Grands-Augustins, fermé depuis le départ du peintre, en 1955. « L’Éventail de Saturne » (3) est une fiction qui met en scène, en 1801, la rencontre d’un lieutenant rallié au nouveau régime bonapartiste (inspiré du personnage de Philippe de Ségur, aide de camp de Napoléon) avec le musicien et le peintre, grâce à la jeune femme qu’il épouse ; et, en miroir, celle de deux jeunes femmes deux siècles plus tard ; l’une est pianiste, spécialiste de Beethoven, l’autre organise à Paris une exposition des œuvres de Goya. Les événements d’hier, en l’occurrence l’assassinat de la duchesse d’Albe, peuvent-ils agir sur aujourd’hui ?
Dans les pas du père
Le nom est connu : Simenon. Le prénom, Pierre, pas encore. Le fils cadet de Georges Simenon publie, à 51 ans, un premier roman, qui n’a rien à voir avec les œuvres de son père mais s’appuie beaucoup sur son expérience personnelle. « Au nom du sang versé » (4) est un thriller « à l’américaine » ; normal, l’auteur vit aux États-Unis, où il est devenu avocat de cinéma à Los Angeles, depuis plus de vingt ans.
Son héros est d’ailleurs un avocat de Los Angeles, qui, rappelé en Suisse pour les funérailles de sa mère, apprend fortuitement que son père aurait collaboré avec les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Il n’a alors de cesse d’établir la vérité et de venger la mémoire paternelle. Une quête qui va le mener des coffres-forts secrets des banques privées de Genève aux ruelles de Cracovie, et des banlieues parisiennes aux plaines du Texas. Au risque de se perdre.
D’amour et de guerre
« Paraguay » (5) est le premier roman de l’Américaine Lily Tuck traduit en français. Récompensé par le National Book Award en 2004, il s’inspire d’un épisode méconnu de l’histoire et de personnages réels, mais il s’agit moins d’une épopée historique que d’une exploration de la folie qui s’empare des hommes lorsqu’ils font mauvais usage de la richesse et du pouvoir.
Le récit commence en 1854, lorsque, à Paris, Francisco Solano, le futur dictateur du Paraguay, fait la rencontre d’Ella Lynch, une belle courtisane irlandaise. Elle le suit à Asunción, où elle devient sa maîtresse et la mère de plusieurs enfants. Plus tard, elle embrassera le rêve impérial de son amant, un rêve qui va précipiter le pays alors prospère dans la guerre de la Triple Alliance, contre le Brésil, l’Argentine et l’Uruguay, jusqu’à la dévastation du Paraguay.
Sur cinq générations
Deux romans signés Wally Lamb, « le Chant de Dolorès », en 1999, et « la Puissance des vaincus », en 2000, deux best-sellers aujourd’hui réédités à l’occasion de la sortie de sa nouvelle épopée, « le Chagrin et la Grâce » (6).
À la fois odyssée personnelle, saga familiale et roman à énigme, l’ouvrage couvre deux siècles d’histoire, une multitude de thèmes et une foule de personnages tous attachants. En scène, un couple, dont le fragile équilibre est mis en péril après que Maureen a échappé de justesse au massacre perpétré par deux adolescents du lycée de Columbine. Traumatisée, elle trouve refuge dans la ferme de son mari. C’est là que celui-ci découvre des documents retraçant l’histoire de sa famille sur cinq générations, depuis la guerre de Sécession jusqu’à nos jours, qui contiennent de terribles révélations. Un roman ambitieux qui transgresse les frontières entre passé et présent, fiction et histoire, mythe et réalité.
Le choc des extrêmes
Grand voyageur devant l’Éternel et écrivain reconnu – le dernier de ses 19 romans, « le Quart d’heure colonial », a été nommé sur la liste du prix Renaudot l’année dernière –, Jean-Claude Derey nous invite à un drôle et dangereux voyage, en Papouasie.
« Papoua » (7) est l’histoire improbable d’un Monseigneur, qui, bien qu’à la retraite, se lance à l’assaut de la tribu cannibale des Fouyoughé pour les évangéliser, après qu’un de ses membres lui a restitué, sous forme d’un tas d’os, son cher neveu qui avait disparu. Pour mener à bien sa mission, il lui faudra affronter le chaman Gouloupouï, qui, loin d’être un fanatique sanguinaire, utilise ses pouvoirs pour protéger sa tribu des effets pernicieux d’une prétendue civilisation qui goudronne les côtes d’en bas.
On aura compris que le choc sera rude et néanmoins drolatique, entre le missionnaire à la recherche d’âmes et le sorcier gardien d’une société aux valeurs bien ancrées, avec sa vie coutumière, ses rites et ses superstitions.
(2) Éditions Alphée-Jean-Paul Bertrand,
314 p., 21 euros.
(3) Calmann-Lévy, 248 p., 17 euros.
(4) Flammarion, 378 p., 21 euros.
(5) Éditions Jacqueline Chambon,
300 p., 22 euros.
(6) Belfond, 533 p., 23 euros.
(7) Éditions Alphée-Jean-Paul Bertrand/Editeurs et Auteurs Associés,
39 p., 21,90 euros.
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