Les mots du client
- « Depuis un moment je me sens fatigué en permanence.
- Mon mari trouve que je suis plus pâle que d’habitude.
- Je suis rapidement essoufflée. »
Rappel physiopathologique
Environ 1 % de tous les globules rouges circulants sont détruits chaque jour et remplacés grâce à l’activité de la moelle osseuse.
L’anémie se définit biologiquement par une diminution du taux d’hémoglobine : les seuils le plus souvent retenus sont 13 g/dl chez l’homme et 12 g/dl chez la femme. Les chiffres sont différents chez les enfants.
En revanche, l’hématocrite et le nombre d’hématies sont moins significatifs, car ils peuvent varier en fonction du volume des érythrocytes.
Les trois grandes causes d’une anémie sont représentées par une destruction accélérée (hémolyse, hypersplénisme – destruction majorée des hématies par la rate), une perte excessive (hémorragies, aiguës ou, plus souvent, chroniques) des érythrocytes ou par une diminution de leur production (carences, myélodysplasies).
L’anémie peut être d’origine centrale non régénérative (taux faible de réticulocytes) ou périphérique, régénérative.
Anémie et cancer.
Une anémie est très fréquemment observée chez les patients souffrant d’un cancer. Ses causes sont volontiers multifactorielles : évolution du cancer lui-même, chimiothérapie, radiothérapie. Bien qu’elle menace rarement le pronostic vital, l’anémie peut altérer plus ou moins profondément la qualité de vie du patient du fait de la fatigue.
L’anémie peut être en rapport avec :
- Une perte sanguine chronique : liée à une carence martiale, microcytaire et hypochrome, elle peut constituer un signe orientant vers le diagnostic (cancer digestif, cancer de l’utérus). Le traitement est représenté par une supplémentation en fer.
- Un syndrome inflammatoire : en rapport avec un excès d’apoptose des érythroblastes. Le rôle de la surexpression de certains facteurs est invoqué, notamment l’interféron gamma et le TNF-alpha. Il s’agit souvent d’une anémie normocytaire et normochrome. Ce même type d’anémie peut être secondaire à un envahissement de la moelle osseuse par les cellules tumorales (hémopathies malignes, cancers du sein, de la prostate, des bronches à petites cellules).
- Un déficit en vitamine B12 ou en folates : il s’agit d’une anémie macrocytaire. La carence en folate est assez fréquente, notamment lors des cachexies, alors que celle en vitamine B12 est plus rare (cancers de l’estomac).
- Une cause auto-immune : c’est typiquement le cas des anémies associées à une maladie lymphoproliférative, comme les lymphomes de bas grade, la leucémie lymphoïde chronique et la maladie de Waldenström.
- La chimiothérapie : la toxicité hématologique des anticancéreux est une cause très fréquente d’anémie. Dans ce cas, l’anémie post-chimiothérapie est souvent associée à une leucopénie et à une thrombopénie. L’anémie peut être également due à un déficit de sécrétion d’érythropoïétine dans les chimiothérapies néphrotoxiques.
Anémie et insuffisance rénale chronique.
L’érythropoïétine est synthétisée essentiellement au niveau du rein, ce qui explique sa déficience lors d’altérations de cet organe.
La concentration d’hémoglobine chute au-dessous de 11 g/dl lorsque le débit de filtration glomérulaire estimé par la clairance de la créatinine devient inférieur à 30 ml/mn (mais, elle peut apparaître dès 60 ml/mn), ce qui correspond au stade 4 (le stade 5 correspond à l’insuffisance rénale « terminale ») de l’insuffisance rénale.
D’autres facteurs peuvent être aussi impliqués : diminution de la demi-vie des érythrocytes (due à la présence de facteurs plasmatiques toxiques), spoliation sanguine.
Anémie et insuffisance cardiaque.
Une anémie est fréquemment rencontrée dans l’insuffisance cardiaque, et d’autant plus souvent que celle-ci est sévère, que la fonction rénale est altérée et que le patient est plus âgé. Elle représente un important facteur de gravité.
Sa pathogenèse est multifactorielle : hémodilution (dans ce cas, il s’agit d’une « fausse anémie »), inflammation chronique (provoquant une séquestration du fer et une résistance à l’érythropoïétine), aggravation d’une maladie rénale chronique (« anémie cardio-rénale »), spoliation sanguine iatrogène.
Les questions à l’officine
Faut-il prendre systématiquement du fer sous forme de médicament durant la grossesse ?
Pas obligatoirement. Un apport suffisant en fer est indispensable, surtout en fin de grossesse, car un manque de fer peut entraîner une anémie augmentant les risques de prématurité et de faible poids du bébé. Il est donc important de consommer régulièrement des aliments qui contiennent du fer : œufs, poisson, viande, légumes secs, lentilles, haricots blancs, pois chiche, oléagineux et épinards. Il est utile aussi de consommer des aliments riches en vitamine C qui facilite l’absorption du fer par l’intestin, comme les citrons, oranges et pamplemousses, ainsi que les brocolis. Si malgré cela survient une anémie, surtout en deuxième partie de grossesse, le médecin prescrira une supplémentation en fer sous forme de médicament.
Mon médecin m’a dit que j’avais un déficit en G6PD. Dois-je prendre beaucoup de précautions dans ma vie de tous les jours ?
C’est un déficit très répandu, mais qui ne signifie pas forcément être malade. En effet, sans accident particulier, la personne atteinte est en bonne santé et a une espérance de vie normale. Plusieurs mutations du gène G6PD sont connues correspondant à des formes plus ou moins graves de la maladie. Elles expliquent que la gravité des accidents d’hémolyse et que les circonstances déclenchantes varient d’une personne à l’autre.
Il est nécessaire de bien connaître les symptômes d’une crise et d’observer des précautions tout au long de sa vie, en évitant d’absorber certains aliments ou produits, surtout les fèves fraîches ou congelées (les fèves et les farines de fèves entrent dans la composition de multiples produits : boulangerie, soupes, purées de légumes en poudre…) et les sodas « toniques » renfermant de la quinine, et ne jamais être traité par certains médicaments. L’Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) a publié un avis sur ce sujet en août 2006 et l’Afssaps (Agence française de sécuritaire sanitaire des produits de santé) en février 2008 un référentiel des médicaments concernés.
Il est très fortement recommandé de porter sur soi en permanence une carte personnelle faisant état de ce déficit et d’en informer systématiquement tous les professionnels de santé.
Avoir trop d’hémoglobine peut-il être dangereux quand on est traité par l’EPO ?
Oui, car il existerait alors un risque de survenue de thromboses. C’est pour cette raison qu’il est impératif de faire réaliser très régulièrement les dosages au laboratoire prescrits par le médecin, dont le plus important est le taux d’hémoglobine ; et aussi le niveau des réserves en fer. Il ne faut pas non plus que le taux d’hémoglobine « monte » trop vite. Il faut aussi penser à surveiller de très près sa pression artérielle, car une hypertension artérielle fait partie des éventuels effets indésirables.
Chez le médecin
Les symptômes de l’anémie, essentiellement liés à l’hypoxie tissulaire, varient selon sa gravité, mais aussi en fonction de sa vitesse d’apparition ; une anémie s’installant progressivement peut être peu symptomatique.
Les principaux signes sont représentés par une pâleur (surtout des paupières inférieures), des paumes et des lèvres, un essoufflement à l’effort, des palpitations, des douleurs thoraciques, une fatigue persistante, des étourdissements, voire des lipothymies.
La recherche de la cause de l’anémie est évidemment essentielle. D’autant que de nombreuses causes sont curables. Les carences en fer sont le plus souvent secondaires à des pertes sanguines chroniques occultes, en vitamine B12 à une gastrite atrophique, une maladie cœliaque, une résection intestinale (iléon) ou à une botriocéphalose, en folates à un régime restrictif, à un état de dénutrition (aliments riches en folates : légumes et fruits frais, légumes secs, laitages, abats, champignons), à l’alcoolisme.
Il faut aussi penser aux anémies en folates iatrogènes dus aux inhibiteurs de la dihydrofolate réductase (méthotrexate).
L’enquête étiologique est parfois évocatrice : âge, origine ethnique (thalassémies), prise médicamenteuse, antécédents personnels ou familiaux, manifestations osseuses, infection virale associée (mycoplasmes, cytomégalovirus, virus d’Epstein-Barr…), existence connue d’une hémopathie ou d’un autre type de cancer.
Les examens biologiques comprennent, toujours la mesure du taux sérique d’hémoglobine (examen clé), l’hématocrite et l’hémogramme : l’anémie peut-être normocytaire, microcytaire ou macrocytaire, selon le volume corpusculaire moyen, la détermination du taux de réticulocytes est fondamental car il permet de savoir si l’anémie est ou non régénérative, avec une origine périphérique dans le premier cas ou centrale dans le second. L’anémie peut être normochrome ou hypochrome, selon la concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine. Autres examens pouvant être utiles en fonction du contexte : bilan du fer (fer sérique, ferritine, coefficient de saturation de la transferrine), bilan hémolytique (bilirubine, LDH, haptoglobine, hémoglobine libre…), dosages de la vitamine B12 et de l’acide folique, tests de Coombs (direct et indirect), myélogramme, étude des hémoglobines (pour chercher une hémoglobinopathie)…
Le traitement
La prise en charge d’une anémie dépend, bien entendu de sa cause, quand on a pu la déterminer.
Un traitement anti-anémique doit faire l’objet d’une surveillance attentive, afin d’éviter, notamment, une correction excessive pouvant à son tour être source de complications.
Les médicaments.
Thérapeutique martiale :
Les apports nécessaires pour compenser les pertes sont d’environ 10 mg par jour chez l’homme, de 20 mg chez la femme, de 25 à 50 mg chez la femme enceinte.
On utilise le plus souvent des sels ferreux administrés par voie orale : ascorbate (Ascofer), chlorure (fer UCB), fumarate (Fumafer), sulfate (Féro-Grad, Tardyféron). Ou encore le férédétate de sodium (Ferrostrane).
La voie injectable est utilisée (hydroxyde ferrique polymaltose - Maltofer) quand la voie orale est impossible.
L’indicateur d’efficacité est représenté par la ferritinémie.
La prise durant les repas améliore la tolérance, mais diminue l’absorption. Le thé, les antiacides et la colestyramine réduisent l’absorption intestinale, tandis qu’une association avec la vitamine C l’augmente.
Les effets indésirables sont représentés par une constipation, une diarrhée, des nausées, céphalées et vertiges. Il faut avertir le patient de la survenue de selles noires.
Erythropoïétines (EPO) :
Les érythropoïétines recombinantes (Aranesp, Eprex, Néorecormon) ont le même mode d’action que l’érythropoïétine naturelle. La réponse au traitement est mesurée par la détermination du taux d’hémoglobine chaque semaine ou toutes les deux semaines jusqu’à stabilisation des résultats.
Il peut être nécessaire d’associer une supplémentation martiale.
Les EPO sont essentiellement utilisées chez les patients atteints d’insuffisance rénale chronique ou recevant une chimiothérapie anticancéreuse anémiante. Les principales causes de « résistances » aux EPO sont représentées par un déficit en fer et les états inflammatoires.
Les deux principaux effets indésirables des EPO sont une augmentation de la pression artérielle (ou l’aggravation d’une hypertension artérielle préexistante) et le risque thrombotique (à craindre surtout en début de traitement), qui serait en relation avec des modifications de certaines protéines de la coagulation, notamment la protéine S.
La vigilance s’impose chez les patients ayant des antécédents de crises convulsives.
Corticoïdes et autres immunosuppresseurs :
Dans les anémies hémolytiques auto-immunes, la corticothérapie représente le traitement de première intention (prednisone : 1 à 2 mg/kg/j per os, pendant 3 à 4 semaines, puis 0,2 mg/kg/j pendant 3 à 6 mois, en association aux mesures préventives des complications d’une corticothérapie prolongée) et, en deuxième, les immunosuppresseurs (cyclophosphamide, azathioprine…), seuls ou en association avec un corticoïde.
Les immunoglobulines polyvalentes sont parfois employées dans les formes aiguës sévères.
Vitamine B 12 :
Les carences en vitamine B12 sont traitées par l’administration de vitamine B12 par voie parentérale à la dose de 1 mg par semaine par voie intramusculaire. Associée à l’arrêt des médicaments pouvant inhiber l’absorption digestive de la vitamine B12 apportée par l’alimentation (lait, œufs, fromages), comme la néomycine et la colchicine.
Le traitement par vitamine B12 entraîne une coloration rouge des urines et peut être responsable de manifestations allergiques : rash, prurit, érythème, œdème de Quincke, choc anaphylactique.
Folates :
L’acide folique (vitamine B9) est administré à la dose de 5 à 15 mg par jour. En cas de carence sévère, on utilise également l’acide folinique, métabolite actif de l’acide folique, par voie orale, intramusculaire ou intra-veineuse.
La diphénylhydantoïne et le phénobarbital inhibent l’absorption des folates.
Transfusions sanguines :
Elles sont mises en œuvre en cas de risque vital imminent ou lorsque l’érythropoïèse du patient est inopérante.
Attention au risque d’allo-immunisation, de contaminations virales, de surcharge volémique et de surcharge ferrique (risque d’hémochromatose)
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion