LE GOUVERNEMENT et les syndicats s’adressent réciproquement le même reproche : celui de l’autisme dont ils seraient affectés. Sous le prétexte de négocier « vraiment », les organisations de travailleurs réclament, en réalité, une complète remise en cause des fondements de la réforme ; le pouvoir, de son côté, n’a peut-être pas pris le temps de convaincre ses interlocuteurs de la nécessité d’une solution dite démographique, c’est-à-dire d’une prolongation des carrières.
On reproche souvent à la France d’ignorer le dialogue social. On prend l’Allemagne en exemple, en montrant que des accords prenant acte des effets de la mondialisation sont signés sans crise majeure. Il est vrai, que dans le cas des retraites, le jeu des manifestations, le poids de sondages, la virulence du peuple tiennent lieu de moyens de pression auxquels le gouvernement résiste ou non, prend en compte ou non, modifie son texte ou non. Pour les handicapés, les mères de famille de trois enfants, les femmes qui, en définitive, pourront prendre leur retraite à taux plein dès 65 ans, il a fait des gestes considérables, qu’il a même chiffrés à plus de trois milliards. Et il a le bon goût de financer ces quelques largesses par une hausse des impôts sur les revenus du capital. De nouvelles concessions rendraient la réforme inefficace. Il faut avoir le courage de dire qu’elle n’a de sens que si elle permet au régime par répartition de trouver son équilibre financier et donc de durer. C’est tout simplement une question de gros sous. Si on ne change pas l’âge du départ à la retraite, il faudra encore augmenter les impôts. Mais des hausses fiscales sont par ailleurs indispensables pour financer la dette. Jusqu’où pouvons-nous aller dans l’hypertrophie des régimes sociaux ?
On ne peut pas augmenter les cotisations.
Cependant, l’Élysée et Matignon doivent prendre en compte l’aspect politique de l’affaire. Ils ont certes conscience que, d’ores et déjà, la plupart des retraites ne sont pas élevées, que leurs bénéficiaires grondent, et qu’il n’y aura pas de croissance en France si le pouvoir d’achat diminue. C’est pourquoi ils n’ont jamais envisagé de réduire le montant des pensions, pas plus qu’ils n’ont songé à augmenter les cotisations. Dans ces conditions, que peuvent proposer les syndicats, qui réclament une mise à plat du texte et une renégociation, sinon un accroissement de la pression fiscale (et peu importe qui en souffre, particuliers ou entreprises dès lors que, de toute façon, cet accroissement nuirait à la croissance) ? La seule question qui vaille aujourd’hui est la suivante : que faut-il faire pour que les syndicats acceptent enfin le report de deux ans de l’âge de la retraite ? Il ne fait pas de doute que le conseiller social de Nicolas Sarkozy, Raymond Soubie, a déjà posé cette question aux dirigeants syndicaux, qui, vraisemblablement, ont refusé de discuter sur cet élément du projet.
Ni la CFDT (François Chérèque a salué les avancées proposées par le gouvernement, mais les juge insuffisantes) ni la CGT n’ont envie de reproduire la crise sociale de 1995. Bernard Thibault l’a encore répété il y a quelques jours. Mais les deux leaders sont conscients de l’extrême combativité de leurs troupes, sans doute plus stimulées par l’aversion pour M. Sarkozy et son mode de gouvernement que par par l’esprit de revendication. Ils prennent soin de ne pas être débordés. M. Chérèque, échaudé par la signature qu’il avait apposée au bas de la réforme des retraites de 2003 (il a perdu des milliers d’adhérents), ne sera guère enclin à une mansuétude qui lui serait fatale. M. Thibault, qui sait donner l’impression d’une très grande fermeté syndicale sans pour autant rejeter quelques accommodements avec le pouvoir, est peut-être le seul homme capable aujourd’hui de nous éviter une crise de plusieurs semaines. Pour autant, il ne faut pas rêver : la réforme est indispensable, mais la majorité des Français n’en veut pas. Nous sommes donc devant un précipice. Nous pouvons certes nous demander s’il n’est pas plus sage d’y renoncer, mais un tel recul jetterait sur la France un discrédit de plusieurs années, sans même faire le compte des milliards que nous perdrions dans l’affaire et dont nous n’avons pas le premier centime.
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion