S’inscrivant dans la lignée des hommages parus à l’occasion du bicentenaire de la naissance du biologiste et naturaliste britannique Charles Darwin, « Darwin. Une scandaleuse vérité » (1) porte la patte de son auteur, Joanny Moulin, qui est professeur de littérature anglaise à l’université de Provence.
Il s’agit donc d’une biographie littéraire, qui s’attache en premier lieu à raconter la personnalité humaine et intellectuelle de Darwin. L’auteur s’est appuyée sur les textes autobiographiques pour multiplier les détails personnels et les sentiments du jeune homme, depuis son enfance dans un milieu familial progressiste, ses études à Cambridge, son initiation à la recherche scientifique et son entrée non sans frictions dans le monde académique. Décidément très vivante, cette biographie retrace le long voyage d’étude à bord du Beagle qu’effectue Darwin entre 1831 et 1836 en Amérique du Sud et dans le Pacifique. Elle continue par l’aventure, intellectuelle, qui s’ensuit et la formulation de ses principales idées. Un livre qui rend perceptible le progressif changement d’optique scientifique.
Tsarévitch à l’âge de 7 ans, Alexandre Nikolaïevitch Romanov ne succède à son père Nicolas Ier qu’en 1855, à 37 ans. « Alexandre II de Russie. La légende du tsar libérateur » (2) peut commencer. Madeleine Kahn – qui a exercé la médecine durant vingt-sept ans avant de se tourner vers l’Histoire et l’écriture et obtenir le prix Littré 2001 avec « l’Écharde » – partage son livre en deux parties. La première décrit le règne d’Alexandre II, surtout connu pour avoir publié l’oukase abolissant l’esclavage, la montée des idées révolutionnaires, les attentats perpétrés contre lui, son assassinat et le début du règne de son fils Alexandre III, parfait autocrate.
La seconde partie nous emmène à la cour de Russie auprès de Cons?tantin, le frère du tsar, de la grande-duchesse Hélène, du révolutionnaire Nicolas Milioutine et du socialiste Alexandre Herzen, et l’on y croise l’ambassadeur français Charles Morny. Avec des incursions plus intimes, comme la liaison d’Alexandre II avec Catherine Dolgorouky, son épouse morganatique qui a trente ans de moins que lui, qu’il a imposée à la cour comme demoiselle d’honneur de la tsarine et qui a fait et défait les ministres.
Épouse, compagne, fille de…
Nous restons en Russie en parcourant le livre de Bertrand Meyer-Stabley, qui, après avoir analysé la vie de Rudolf Noureev, nous mène dans l’intimité de « la Comtesse Tolstoï » (3). « Quelle merveilleuse intelligence des autres dans ses livres, et quel extraordinaire défaut de compréhension dans sa vie privée ! (…) Il n’a jamais pris la peine de me comprendre, et m’ignore du tout au tout », relève-t-on entre bien d’autres récriminations de Sonia Andreïevna Bers, qui était devenue, en 1862 , l’épouse de Léon Tolstoï, de seize ans son aînée. « Là où tu es, l’air est empoisonné », lui rétorque-t-il.
On n’entre pas sans malaise dans les relations personnelles de ce couple célèbre, qui ont eu pour théâtre le domaine d’Iasnaïa Poliana, près de la ville de Toula, à 200 km au sud de Moscou, où sont nés leurs 13 enfants. Sonia y a assuré leur éducation, géré le domaine agricole, relu et recopié les manuscrits de l’écrivain, dont « Guerre et Paix », dans les années 1860. Mais la mésentente, qui couvait depuis le début, depuis que Léon s’était révélé tel qu’il était en montrant son journal à sa fiancée – buveur, joueur et surtout séducteur – s’aggrave lorsque l’homme qui aime les plaisirs et n’a pas réussi à s’en détacher, se retourne contre la femme, sa femme, pulsionnelle et rusée et qui l’empêche d’accéder à la spiritualité. Il aspire à un nouvel ordre social et familial dont sont bannis le profit, la propriété privée et la vie sexuelle, elle ne l’admet pas. Léon Tolstoï finira par fuir le domicile conjugal à l’automne 1910 pour aller mourir d’une pneumonie dans une petite gare.
Destin compliqué aussi que celui raconté dans une ample et pertinente biographie signée Françoise Liffran, de « Margherita Sarfatti. L’égérie du Duce » (4). Vénitienne, fille d’une riche famille juive, cultivée et érudite en matière artistique, mariée à un avocat qui sera maire de Milan, elle y rencontre en 1912 Benito Mussolini. Une passion amoureuse les réunit et par sa fortune, ses écrits, ses réseaux, elle va soutenir l’ascension du Duce jusqu’à la Marche sur Rome et l’instauration du nouveau régime. Dans le même temps, elle rassemble les artistes majeurs de l’époque autour du mouvement Novocento italiano, dont elle va faire l’emblème culturel de la « révolution fasciste ».
L’étoile du chantre du fascisme décline au début des années 1930 lorsque Mussolini l’écarte de sa vie privée, mais elle restera sa conseillère jusqu’à son rapprochement avec Hitler. En 1938, victime des lois antijuives, elle doit fuir. Neuf ans plus tard elle reviendra mourir dans sa villa près de Côme.
Retour au passé avec le portrait de celle que Christine Drouard appelle « la fille de l’ombre », « Solange Sand ou la Folie d’aimer » (5). Journaliste dans la presse féministe, l’auteur se penche sur les malheurs de la fille de George Sand, Solange, la mal-aimée, que sa mère a envoyée très jeune en pension et qui a eu la malchance, encore enfant, mais déjà très féminine d’apparence, de séduire les Sandeau, Chopin, Delacroix, amis et amants de l’écrivain. Jusqu’à la rupture, quand Solange a mis un terme à des fiançailles voulues par sa mère afin de l’éloigner de son cercle, et épousé le sulfureux sculpteur Clésinger. Christine Drouard rend justice à cette jeune femme « fantaisiste, intelligente, fidèle en amitié comme en amour » et qui fut, comme sa mère, « en avance sur son temps ».
(2) Éditions Atlantica, 164 p., photos noir et blanc, 18 euros.
(3) Éditions Payot, 183 p., un cahier de photos noir et blanc, 18 euros.
(4) Éditions du Seuil, 754 p., un cahier de photos noir et blanc, 28 euros.
(5) Éditions Belfond, 232 p., 18,50 euros.
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