LA FERMETURE des mines, programmée depuis 40 ans et effective depuis 20, a notamment eu pour effet le vieillissement des ayants-droit de leur régime social, et, in fine, l’interrogation sur l’avenir de leurs structures sanitaires, dont leurs pharmacies. Un rapport sur cette question a semé le doute parmi les pharmaciens libéraux de la région. « Ce n’est qu’un rapport, tempère Christian Courcelle. Mais nous n’avons pas été consultés et restons dans une complète incertitude. » Il n’empêche : ce rapport sur le régime social minier, demandé au député (UMP) du Bas-Rhin Yves Bur et remis à la fin de l’année dernière, a consterné les pharmaciens des bassins miniers, en particulier du Nord-Pas-de-Calais. Après la Cour des comptes, le député alsacien préconise en effet l’ouverture bilatérale des pharmacies minières. « L’enterrement du quorum », pour Christian Courcelle, pharmacien à Barlin (Pas-de-Calais), en charge du dossier pour le syndicat.
La loi de 1946 a créé un régime de Sécurité sociale pour les mineurs et leurs ayants-droit. Ils bénéficient de la gratuité des soins, les caisses régionales du régime minier (CARMI) gérant à leur intention des cabinets avec des médecins et des dentistes salariés, et des pharmacies « fermées », c’est-à-dire réservées aux seuls affiliés. En 1990, à Oignies, fermait le dernier des 852 puits du bassin du Nord-Pas-de-Calais, marquant un terme à vingt années d’abandon progressif. De 1,2 million de bénéficiaires en 1950, quand 70 000 mineurs allaient au fond pour 400 000 actifs, la CARMI ne comptait plus que 65 714 affiliés en 2009. « La moyenne d’âge de nos affiliés est de 80 ans, il en meurt 5 à 6 % par an, convient Marc Manigard, responsable de la communication de la CARMI Nord Pas de Calais, mais, avec ou sans rapport Bur, la CARMI préconise le statu quo. C’est-à-dire la disparition progressive des pharmacies, sans ouverture bilatérale. »
Quorum inacceptable.
Cette ouverture que proposent aussi bien la Cour des comptes que le député Yves Bur, c’est le mot qui fâche. Sa bilatéralité signifie l’ouverture des pharmacies libérales aux affiliés du régime minier, déjà effective pour les gardes, mais aussi celle des pharmacies minières aux assurés du régime général. « Le quorum a été institué en incluant les populations minières, rappelle Christian Courcelle. Barlin, par exemple, compte 8 000 habitants pour trois pharmacies libérales, ce qui est correct. Si la pharmacie minière ouvrait au régime général, cela ramènerait à 2 000 habitants la répartition par officine. » Inacceptable pour les pharmaciens libéraux.
Le bassin minier couvre le quart de la région, soit environ le quart des 1 600 officinaux. Ainsi, quelque 400 pharmaciens côtoient encore 34 pharmacies minières, près d’une pour dix. « Il est très difficile de se faire une idée du régime minier, très opaque, poursuit Christian Courcelle. Leur panier moyen est sûrement important du fait de l’âge des clients, de la couverture intégrale, de pathologies chroniques. Mais le nombre d’ayants droit baisse fortement. »
Le bassin minier se trouve donc plongé dans l’expectative. À Barlin les relations sont bonnes : « On se dépanne mutuellement », indique Christian Courcelle. Ailleurs, c’est peut-être parfois plus tendu. On soupçonne la CARMI d’avoir menacé de ne pas rembourser les achats en officine libérale. Des médecins miniers prescriraient des piqûres par séries en semaine, à l’unité en fin de semaine : les pharmacies minières ne tiennent pas de garde.
« Elles ne paient pas de patente, ne tiennent pas commerce ouvert ; ce sont des services », rappelle Christian Courcelle. Des services dont il conteste un peu l’efficacité quand un affilié minier vient se faire expliquer des posologies. « Le numerus clausus doit être respecté, reprend-il. Si ce n’était pas le cas, cela s’appellerait une dérogation, faisant jurisprudence, une croix sur le quorum ! On bafoue la loi de répartition, un bien mauvais signe quand l’actualité montre combien l’absence d’une telle loi a bouleversé la démographie des médecins. »
« Notre perte de clientèle est de 5 % par an, et nous passerons à 7 %, ramenant l’espérance de vie de nos pharmacies à 5 ans, rassure Marc Manigard. Notre seul but est d’éviter les licenciements de nos personnels. » Pourquoi alors ces rapports officiels, si chacun sur place préconise le statu quo ?
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