LUTTER contre la désertification médicale : ce sera l’une des priorités de Nicolas Sarkozy pour 2011. En déplacement la semaine dernière à Orbec (Calvados) dans un pôle de santé pluridisciplinaire, le chef de l’État a présenté les grandes lignes du plan d’action de son gouvernement pour préserver une offre de santé en médecine libérale. Une bonne nouvelle aussi pour les officinaux dont le destin est souvent lié à celui des médecins. Fidèle à son style, le président de la République compte avancer vite sur ce dossier. « Vous n’aurez pas longtemps à attendre, a-t-il assuré. Les premières mesures seront prises avant la fin de l’année. Elles le seront toutes avant la fin 2011. » Ces premières dispositions devraient concerner la formation des praticiens, la simplification des formalités administratives et l’évolution de leur rémunération. Mais Nicolas Sarkozy souhaite également favoriser l’aide à l’installation dans les zones « sous-dense » et faciliter le regroupement des professionnels de santé. Il rappelle par ailleurs l’objectif du gouvernement de créer 250 maisons de santé d’ici à 2012. Créations auxquelles les pharmaciens espèrent d’ailleurs être associés afin que ces implantations ne déstabilisent pas le maillage officinal. Plus largement, le chef de l’État entend s’appuyer sur les préconisations du rapport d’Élisabeth Hubert sur l’avenir de la médecine de proximité, que l’ancienne ministre de la Santé lui a remis fin novembre.
Cette dernière insiste pour sa part sur la cohérence de son projet. « Ce rapport est un tout, explique-t-elle. Ne retenir que les mesures les plus immédiates serait dangereux pour l’avenir, mais se focaliser sur les seules dispositions à moyen ou à long terme nuirait au sens même de la mission, qui est de garantir durablement et équitablement l’accès à une offre de santé de proximité. » D’emblée, Élisabeth Hubert indique qu’elle a délibérément choisi de ne pas proposer de mesures coercitives pour combattre la désertification, l’incitation n’ayant pas encore été, selon elle, suffisamment explorée. Une loi de répartition des médecins sur le territoire, comme elle existe pour les officines, n’est donc pas sur les tablettes de l’ancienne ministre de la Santé. Le président de la République s’y serait de toute façon certainement opposé. À Orbec, Nicolas Sarkozy a, en effet, clairement dit préférer les mesures d’incitation, soutenant, par exemple, les contrats d’engagement de service public (voir encadré). « C’est une très bonne chose pour la démocratisation des études de médecine et cela permettra d’avoir des médecins dans les zones où on en manque », estime ainsi le chef de l’État.
Les atouts de la coopération.
Élisabeth Hubert mise aussi énormément sur la coopération entre professionnels de santé. Cela représente, à ses yeux, un moyen de pallier la baisse prévisible du nombre de médecins dans les prochaines années, alors même qu’il faudra faire face à un accroissement de la demande de soins. « Ce constat conduit à rechercher les modalités d’un transfert de tâches vers d’autres professions de santé afin de dégager du « temps médical » et permettre aux médecins de se recentrer sur ce qui constitue leur cœur de métier et leur véritable valeur ajoutée », argumente-t-elle. Pour l’heure, le rapport avance quelques pistes inspirées d’expériences étrangères, telles la coopération entre médecins et sages-femmes dans le suivi des grossesses, la délégation aux infirmiers d’une partie de l’éducation thérapeutique, ou la délégation d’actes d’ophtalmologies aux orthoptistes. Plus intéressant, Élisabeth Hubert n’oublie pas la présence des officinaux dans le paysage sanitaire et les nouveaux rôles qu’ils pourraient y jouer. Elle estime ainsi que le partage des compétences entre professionnels pourrait être institué « dans des situations très spécifiques et dans des conditions précises, telles que l’absence de médecins sur un territoire où sont par contre présents paramédicaux et pharmaciens ». Et d’ajouter que ces nouvelles missions devraient être indemnisées. « Pour satisfaire à ces légitimes ambitions de développement de coopération dont on a vu qu’elles allaient dans le sens du vent de l’histoire et qu’elles étaient, qui plus est, certainement un élément de réponse à la désertification médicale, il importe de revisiter les modes de rémunération des professionnels de santé », préconise-t-elle dans son rapport.
Même si ce partage des compétences suscite encore des réticences de part et d’autre, la loi hôpital, patients, santé et territoires (HPST) pourrait bien amorcer un déblocage de la situation et une évolution des mentalités. Le décret sur le pharmacien correspondant, dont la publication est imminente, en est un exemple. Déjà, la mise en place du pharmacien référent dans les maisons de retraite, aux côtés du médecin coordonnateur, a été couronnée de succès, selon un récent rapport de l’IGAS* (voir ci-dessous).
Des ordonnances à distance.
Élisabeth Hubert recommande également de s’appuyer sur les officinaux dans le cadre d’un renforcement de la permanence des soins. Elle plaide ainsi pour le développement de la prescription médicamenteuse téléphonique afin d’éviter un déplacement de médecin, souvent inutile et toujours coûteux. Reprenant des préconisations de la direction générale de l’offre de soins (DGOS), elle indique que la prescription à distance pourrait aussi concerner un médicament présent dans la pharmacie familiale. « Pour aider à diminuer le recours au médecin de garde, voire aux services d’urgences hospitaliers, il serait intéressant de constituer dans chaque foyer une « trousse » médicale familiale, avec l’aide du pharmacien d’officine et sous son contrôle régulier », explique le rapport Hubert.
« Nous sommes aujourd’hui devant une alternative simple : laisser faire ou agir », conclut l’ancienne ministre de la Santé. Et, selon elle, laisser faire risque notamment de déboucher sur « une raréfaction, accélérée dans toutes les régions, non plus seulement en médecins généralistes mais également des autres acteurs de la chaîne de soins, tant sont interpénétrées les activités des médecins, pharmaciens, infirmiers, kinés et autres professionnels de santé libéraux ». Une crainte exprimée depuis longtemps par les officinaux, mais qui est désormais écrite noir sur blanc et transmise au président de la République.
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