QUI DIT île de Pâques (ou Rapa Nui), dit moaï. Et pourtant, ce bout de terre le plus éloigné de tout rivage, aussi grand que Paris, vaut surtout le déplacement pour ses paysages irréels. Volcans endormis, vallées aux vertes prairies, forêts d’eucalyptus ou de cocotiers, plages paradisiaques, rien ne manque pour se sentir dans un autre monde. Il suffit de croiser un troupeau de chevaux sauvages le long d’une falaise aux rochers acérés pour parachever l’impression prégnante de rêve éveillé.
Iorana : Hanga Roa, le chef-lieu, vous accueille en quatre langues, espagnol, pascuan, anglais et français, et la plupart des 6 000 résidents de l’île (Chiliens qui y ont vu un eldorado, Pascuans de pure souche et étrangers avides d’antipodes) se parent de leur plus beau sourire pour vous souhaiter la bienvenue. Il y flotte un goût de Polynésie matinée de culture latine, les embruns marins caressent les statues séculaires et une sensation de bien-être, évidente et immédiate, vous transporte tout le long de votre séjour. Et qu’importe les petites averses qui viennent arroser l’île régulièrement, tant le soleil, éclatant, vient ponctuer la journée de sa chaleur et dévoiler des paysages aux couleurs contrastées impressionnantes.
Ce qui surprend au premier abord, c’est ce paradoxe : être au bout du bout du monde et pourtant submergé par la civilisation, à savoir l’une des plus grandes pistes d’atterrissage d’Amérique latine, près de 3?000 véhicules qui traversent l’île (voitures, taxis, motos…), Internet qui relie Rapa Nui au reste de la planète… Et pourtant, tout indique que nous sommes dans un autre univers, un autre espace-temps : la nuit qui se lève plutôt qu’elle ne tombe, une voie lactée de toute pureté, les traditions pascuanes préservées et qui tentent de subsister à la mondialisation, perpétuant le mystère qui nimbe l’île de Pâques, résonant cependant comme un immense tiroir-caisse. Car Rapa Nui a beau être le plus grand musée à ciel ouvert du monde, elle ne subsiste de rien d’autre, ou presque, que du tourisme. Une manne qui est également sa perte. Car si la plupart des touristes respectent les nombreuses interdictions de toucher au patrimoine pascuan, nombreux pourtant sont ceux qui en veulent leur part et n’hésitent pas à piller les pierres sacrées pour en ramener quelques souvenirs.
À Hanga Roa, vous trouverez différents marchés artisanaux (ne pas hésiter à marchander les prix, souvent attribués à la tête du client ou selon les besoins financiers du vendeur), une église au Christ « moaïsé », un cimetière coloré et fleuri, des restaurants tenus notamment par des Européens, diverses échoppes et même un tatoueur dont la renommée a traversé les océans. Le soir, les musiques tribales retentissent et des spectacles de danses folkloriques, esthétiques et musculeuses vous attendent dans un rythme endiablé.
Très vite, l’appel de l’aventure vous gagnera. Pour visiter l’île, plusieurs solutions : louer un véhicule, prendre un des nombreux taxis au coût modeste, s’adjoindre les services d’un guide ou participer à des excursions organisées, à pied, en bus, à vélo ou à cheval, tout est possible. Il y en a pour toutes les bourses. Le mieux étant de préférer la compagnie d’un Pascuan ou d’un étranger habitant sur l’île depuis de nombreuses années, dans des petits groupes, afin de ne pas avoir l’impression de courir en permanence et de profiter de l’instant présent sans se presser. Il y a tellement de sites à découvrir qu’il serait dommage de les traverser sans s’y arrêter réellement. C’est pourquoi passer une semaine sur l’île est le minimum pour pouvoir en savourer pleinement chaque moment.
D’ahus en volcans.
Bien évidemment, ce sont les moaïs qui vont attirer toute votre attention au début de votre voyage. Si les découvertes archéologiques ont pu lever un pan du mystère autour de ces statues mythiques, de nombreuses questions restent encore en suspens. Peut-être aurez-vous votre propre hypothèse sur la manière dont les moaïs, qui pèsent plusieurs tonnes, ont pu être acheminés du volcan Rano Raraku où ils ont été taillés, jusqu’à leur lieu d’élévation, parfois à plusieurs dizaines de kilomètres de là. Parmi tous ceux qui sont visibles (on suppose qu’il en existe encore beaucoup qui n’ont pas été mis à jour), certains ahus (ou autels) sont à voir en priorité. Tels les sept moaïs de l’Ahu Nau Nau, dont quatre sont en état de conservation impeccables et encore chapeautés. Ou les sept statues de l’Ahu Akivi, symbolisant les fils de sept chefs envoyés à l’inconnu, seuls moaïs tournés vers la mer, au lieu des terres. Plus impressionnant encore, l’Ahu Tongariki, soit quinze statues alignées côte à côte, dont on pense qu’elles représentent des chefs de clan censés surveiller (ou terroriser ?) les habitants après leur mort. Sans oublier la carrière de Puna Kau qui servit à tailler les chapeaux des moaïs, coiffes pesant elles-mêmes plusieurs tonnes dont on ignore toujours ce qu’elles représentaient exactement et comment elles ont pu être dressées sur la tête qui leur était destinée.
Curieusement, ce ne sont pas les moaïs qui impriment la rétine, mais l’environnement naturel où ils ont été disséminés, ainsi que les vestiges laissés par les ancêtres des actuels Pascuans, telles les anciennes habitations du village reconstitué d’Orongo lors de la grande cérémonie de l’Homme-Oiseau, près du sublime volcan Rano Kau au cratère recouvert d’un lac peuplé de roseaux géants.
Autre volcan, autres paysages, le Terevaka, qui offre une vue à couper le souffle sur l’ensemble de l’île, où le ciel se confond avec la mer. On ne saurait trop vous recommander de faire la grande randonnée équestre de quatre heures qui y mène et qui vaut à elle seule le détour. Pour les adeptes de la bronzette, la plage d’Anakena, au sable blanc et bordée de cocotiers, est un ravissement. On y déguste juste à côté des grillades typiquement latines et des desserts chiliens et polynésiens.
Grottes aux parois décorées, bananeraies enfouies dans des cavernes ouvertes, l’île de Pâques recèle bien des surprises. Et ne craignez pas les chiens errants qui pullulent ici ou là, ils vous serviront de guides en l’échange d’une caresse. Un seul regret, celui de quitter cet écrin des antipodes au charme envoûtant, sans être certain de jamais y revenir.
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