Élections départementales les 22 et 29 mars

Le crash test

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Publié le 16/03/2015

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Ces élections départementales, auxquelles les Français ne comprennent pas grand-chose, remplacent les cantonales de naguère, quand 100 000 élus désignaient les conseillers généraux. C’est l’aboutissement imprévu d’une réforme avortée. Manuel Valls avait promis de supprimer les départements, il en a différé la décision et l’Assemblée a substitué le suffrage universel à celui des grands électeurs.

Pourtant, les départementales, dont le premier tour se déroulera dimanche prochain, vont constituer un test grandeur nature des popularités des grandes formations politiques. Tous les sondages donnent le Front national en tête, à 30 % des suffrages ou plus, avec l’UMP qui arrive juste derrière et le PS loin derrière. Comble de l’absurde, les compétences des départements n’ont pas encore été définies, de sorte que l’on demande aux Français de voter pour mettre en place une administration dont ils ne savent pas encore ce qu’elle fera. Au moment où le PS et l’UMP appellent le peuple à montrer son civisme et à ne pas s’abstenir, le paradoxe saute aux yeux. Mais beaucoup de gens se rendront aux urnes, ce sont les électeurs du Front. Celui-ci ne tire son avance que d’un taux d’abstention qui s’annonce élevé. Si les électeurs de gauche et de droite allaient tous voter, la progression du FN serait moins sensible.

Gauche et droite sont inquiètes. L’UMP, pourtant, devrait gagner de nombreux cantons supplémentaires, tandis que le PS devrait en perdre encore plus. Depuis quinze jours, les socialistes estiment que les carottes sont cuites et qu’un sursaut de l’électorat socialiste déçu est improbable. La droite, de son côté, ne devrait pas se réjouir du succès qu’elle attend car, si la gauche est écrasée, le résultat ne masquera pas la montée du Front, lequel a déjà gagné les élections européennes et s’apprête à se retrouver en tête des régionales à la fin de l’année. De tels progrès de l’extrême droite font peser une menace sans précédent sur l’élection présidentielle de 2017 et les législatives qui s’ensuivront. Tout semble montrer que, au second tour, le FN sera présent et qu’un des deux grands partis, le PS ou l’UMP, aura été éliminé.

Hollande en sandwich.

François Hollande n’entend pas livrer, à l’occasion des départementales, une bataille susceptible de gagner des suffrages. Il ne changera ni de Premier ministre ni de programme, mais il s’efforce d’élargir sa majorité. Il fait les yeux doux aux frondeurs qui semblent rester de marbre en dépit de cette tentative de séduction et il miserait encore sur un retour des écologistes au gouvernement, alors même que Cécile Duflot essaie de constituer, avec le Front de gauche, un parti plus large de l’extrême gauche. Il est donc évident que, si le président s’en tient à sa politique sociale et économique néo-libérale, il aura affaire à deux oppositions, celle de gauche et celle de droite, ce qui ne va pas lui laisser une majorité suffisante et encore moins une marge de manœuvre stratégique.

Hollande en sandwich.

D’aucuns estiment que le chef de l’État en a fini avec les réformes qui, en France, sont si difficiles à voter et à appliquer. Il adopterait, pour les deux années qui viennent, une politique étale, peu propice aux déchirements de la gauche. En fait, il ne veut pas, au grand dam d’Emmanuel Macron, prince de la réforme, dire exactement ce qu’il est, un socialiste ou un libéral. Comme d’habitude, il espère aussi que la conjoncture va s’améliorer. Il cite la baisse de l’euro, la baisse des prix de l’énergie, le rebond chinois, la croissance américaine, autant de facteurs qui devraient favoriser la reprise en France. Malheureusement, personne n’ose dire pour le moment qu’il y aura une diminution du chômage en 2015 et en 2016, de sorte que l’électorat ne trouvera, au bout du quinquennat, aucune raison de penser qu’il doit renouveler celui de François Hollande.

La droite a de meilleures perspectives, pour autant qu’elle puisse rallier son électorat. Pratiquement, l’union entre UMP, UDI et MoDem a été réalisée dans presque tous les cantons, de sorte que les trois partis iront en rangs serrés aux départementales. Leur sort ne dépend que de la mobilisation de leur électorat. Mais le Front fait peser sur les deux années qui viennent une menace très sérieuse. Il est bel et bien devenu le premier parti de France, il bénéficie d’un vote d’adhésion et il va profiter à plein du scrutin majoritaire à deux tours.

Richard Liscia