La rentrée littéraire est d’abord affaire de chiffres. Avec 567 titres, elle est plus resserrée que l’an dernier, tant pour les romans français (- 2,4 %, 381 titres) qu’étrangers (- 2,6 %). Elle est aussi affaire de contenu, avec des fictions qui font écho aux traumatismes de notre époque, ici ou ailleurs. La guerre est omniprésente, mais aussi la politique répressive des gouvernements, la corruption des puissants, le cynisme des géants de l’industrie, la précarité des migrants ou la menace terroriste… Le chapitre de la violence sociale est également bien rempli.
Le fait marquant de cette année est le nombre de premiers romans, 94 titres recensés (contre 81 en 2017), le quart de la production française. Accueillis par des éditeurs indépendants mais aussi dans certaines grandes maisons, les primo-romanciers ont parfois été déjà remarqués avec des nouvelles (Aminata Aidara), des livres pour la jeunesse (Marie-Aude Murail), des chansons (Marc Citti), des blogs (Paul Béhergé) ou des chroniques radiophoniques (Juliette Arnaud).
Les primo-romanciers d’hier ne sont pas oubliés, qui sont 53 à publier leur deuxième roman, près d'un sur quatre ayant été distingué par un prix littéraire. Ainsi Adrien Bosc, Grand prix de l’Académie française 2014 pour « Constellation », qui signe « Capitaine », le récit du périple vers l’Amérique d'un bateau avec à son bord des artistes, écrivains, savants et affairistes fuyant le régime de Vichy (Stock). Et aussi Guy Boley (« Fils du feu », Grasset, 2016), Elisa Shua Dusapin (« Hiver à Sokcho », Zoé, 2016), Jérémy Fel (« les Loups à leur porte », Rivages, 2015).
Quelques incontournables
Christophe Boltanski, également, qui fait partie des dix « incontournables » retenus par le magazine « Livres Hebdo » (qui vient de faire peau neuve). Lauréat du prix Femina 2015 pour son premier roman, « la Cache », il raconte dans « le Guetteur » la quête d’un fils pour découvrir le vrai visage de sa mère défunte, auteure d’un polar inachevé, engagée contre la guerre d’Algérie et qui finit par se couper du monde (Stock).
Récompensée par le prix Décembre 2015 pour « Un amour impossible », Christine Angot continue d’explorer la question de l’amour dans « Un tournant de la vie » : la narratrice, après avoir aperçu dans la rue son ex, quitté dix ans auparavant et par ailleurs ami de son mari, se demande si elle va retourner vivre avec lui (Flammarion).
Lauréat du prix Goncourt en 2012 pour « le Sermon sur la chute de Rome », Jérôme Ferrari consacre « À son image » à une photographe décédée, abordant la violence des conflits contemporains et interrogeant les liens troubles entre l’image, le réel et la mort (Actes Sud).
Dans son troisième roman « les Idéaux », l’ancienne ministre socialiste de la Culture Aurélie Filippetti fait le récit d’un amour entre deux députés que tout oppose, leurs convictions politiques et leur histoire familiale (Fayard).
Prix Médicis pour « Naissance d’un pont » en 2010 et multiprimée en 2014 pour « Réparer les vivants », Maylis de Kerangal donne, avec « Un monde à portée de main », un roman d’apprentissage esthétique et existentiel, en suivant le parcours d’une jeune femme depuis sa formation au trompe-l’œil, en Russie, à Cinecittà et enfin à Lascaux (Verticales).
Si Yasmina Khadra est algérien, « Khalil », le héros éponyme de son roman, est un jeune d’origine marocaine qui a grandi en Belgique sans réussir à s’intégrer et qui tombe dans les griffes d’un réseau djihadiste ; un attentat manqué le conduit à s’interroger sur ses choix et ses actes (Julliard).
Dans « les Prénoms épicène », son 27e roman, Amélie Nothomb explore, à travers la relation père-fille, les prénoms qui peuvent être portés aussi bien par des hommes que par des femmes (Albin Michel).
Multirécompensée (dont le prix Renaudot en 2006 pour « Mémoires de porc-épic »), l’œuvre d’Alain Mabanckou s’étoffe avec « les Cigognes sont immortelles ». Le roman, qui se passe dans sa ville natale de Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville, brosse, à travers le regard d’un collégien, une fresque du colonialisme, de la décolonisation et de l’impasse du continent africain (Seuil).
Après « 2084 - La fin du monde », qui lui a valu le Grand Prix du Roman de l’Académie française 2015, Boualem Sansal situe « le Train d’Erlingen ou La métamorphose de Dieu » dans une ville assiégée par un ennemi inconnu qui veut faire de la soumission à Dieu la loi unique de l’humanité (Gallimard).
En attendant l'Amérique
Avec 186 titres (contre 191 l’an dernier), la rentrée étrangère constitue, comme les années précédentes, le tiers du cru automnal, et l’on note le même engouement pour les premiers romans (64). Festival America oblige, la littérature anglo-saxonne s’impose encore plus que d’habitude, avec 54 % des traductions. Nous reviendrons sur cette importante manifestation qui se déroulera à Vincennes à partir du 20 septembre ainsi que sur les immanquables romans venus d’ailleurs.
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