LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Plusieurs études publiées récemment pointent du doigt la forte baisse de la trésorerie des officines. Avez-vous également constaté ce phénomène ?
PHILIPPE BECKER.- Notre dernière enquête sur l’économie des officines, basée sur des données issues des bilans 2008, fait en effet apparaître une augmentation du découvert moyen. Sur les trois dernières années, ce découvert moyen progresse de 16 % et, sur la seule année 2008, le nombre d’officines ayant dû se résoudre à utiliser le découvert a augmenté de 4 %. Sans tomber dans la psychose, il faut bien admettre que la situation de trésorerie est aujourd’hui plus difficile pour les pharmaciens.
CHRISTIAN NOUVEL.- On peut dire aussi que, pour beaucoup de pharmaciens, la trésorerie baisse sans forcément créer du découvert. Cette situation affecte forcément le moral et modifie les comportements.
Justement, le niveau de trésorerie est-il un bon indicateur pour mesurer la santé financière et économique d’une profession ?
CHRISTIAN NOUVEL.- La trésorerie, c’est la température que l’on mesure avec un thermomètre ou encore la tension sanguine que l’on teste avec un tensiomètre. Il s’agit d’un indicateur qu’il faut analyser avec recul, en faisant attention aux conditions de la mesure et à la qualité des instruments utilisés.
En pratique, une forte baisse de la trésorerie est un symptôme qui n’explique pas le « pourquoi » des choses. Il faut souvent faire des analyses complémentaires pour établir le bon diagnostic. Quoi qu’il en soit, dans une telle hypothèse, il faut vite consulter son expert-comptable !
Quelle est votre analyse sur la situation actuelle et peut-on envisager une plus grande dégradation encore de la situation des officines ?
PHILIPPE BECKER.- Outre la loi LME (loi de modernisation de l’économie), qui a prévu de réduire le crédit moyen fournisseur, globalement, la baisse de trésorerie, selon nos observations, est liée à ce que l’on appelle l’effet de ciseau. C’est-à-dire que l’activité a stagné - si on tient compte de l’inflation - alors que, dans le même temps, les frais ont progressé souvent plus vite que l’indice des prix.
Habitués, depuis dix ans, à une évolution constante des chiffres d’affaires, les officinaux n’ont pas eu le temps d’adapter leurs effectifs à cette nouvelle donne économique. Si les pharmaciens ne réagissent pas dans ce domaine, il est vraisemblable que la dégradation de la trésorerie se poursuivra.
Y a-t-il une typologie d’officines plus particulièrement touchée selon vos constats ?
CHRISTIAN NOUVEL.- Comme cela était prévisible, les officines les plus touchées sont celles qui ont été acquises il y a peu de temps et sur des valeurs excessives qui n’ont absolument pas pris en compte une baisse éventuelle de la de rentabilité. Nous attirons depuis longtemps l’attention de la profession sur la déconnexion entre les prix de vente des officines et leur capacité bénéficiaire. Les faits, aujourd’hui, nous donnent malheureusement raison.
Dans ces conditions, faut-il s’attendre à des dépôts de bilan en nombre ?
PHILIPPE BECKER.- Nous ne sommes pas loin de retrouver la situation du début des années 1990. Toutefois, les protagonistes ont plus de recul par rapport à une telle situation et ils souhaiteront, nous le pensons, éviter la contagion. C’est pourquoi la meilleure parade consiste à rester vigilant et à ne pas pratiquer la politique de l’autruche. Il n’y a pas de honte à avoir une difficulté de trésorerie : c’est même assez courant dans la vie d’une entreprise. La seule façon de s’en sortir, c’est d’être lucide ou, le cas échéant, d’avoir un expert-comptable lucide…
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