FACE À LA PRESSION des consommateurs, de plus en plus consom’acteurs, les entreprises ont investi le développement durable. Depuis 2003, la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001 impose la publication des conséquences environnementales et sociales de l’activité de toute société cotée sur un marché réglementé. Un exercice désormais incontournable auquel chacune a su se plier. Sanofi-aventis met son rapport RSE (responsabilité sociale des entreprises) sur son site Internet qui ne l’imprime plus et réalise une économie de 9,2 tonnes de dioxyde de carbone (CO2). Un détail face à ses engagements déclinés en quatre axes : le patient, l’éthique, les collaborateurs et les communautés locales, la performance environnementale.
Ce sont aussi les piliers du développement durable aux yeux du LEEM (Les entreprises du médicament), qui met en place, depuis 2006, « une démarche de responsabilité sociétale commune, qui favorise l’efficacité collective sans pour autant se substituer aux entreprises ». Il travaille sur des sujets tels que les résidus de médicaments dans l’eau ou le bilan carbone. En termes de performance environnementale, le LEEM a signé une convention avec les ministères de la Santé et de l’Environnement, qui définit des priorités telles que la maîtrise de l’impact sur l’environnement tout au long de la vie du médicament ou la gestion des déchets. Les génériqueurs n’échappent pas à la règle. Actavis a ainsi créé sa fondation d’entreprise sur ce thème, en juin 2009, dans le but d’accompagner les professionnels de santé dans leur rôle environnemental et d’informer le grand public. De son côté, Sandoz est entré dans une démarche de santé durable avec deux volets : la mise à disposition de sacs à médicaments non utilisés (MNU) pour inciter les usagers à les ramener en pharmacie, et l’installation de bornes de récupération des déchets d’activité de soins à risques infectieux (DASRI), gratuitement, en pharmacie. En juin dernier, plus de 140 bornes étaient implantées.
Engagements responsables.
Les groupes spécialisés en cosmétiques sont nombreux à s’investir et certains font figure d’exemple. Kibio utilise uniquement des matières recyclées ou éco-gérées et 100 % recyclables pour ses couvercles, étuis et notices, avec un emballage secondaire réduit, des grammages légers, un nombre limité de composants dans les produits (dont la formulation est en ligne sur son site Internet), etc. Le laboratoire garantit que la transformation et la fabrication des produits emploient des procédés non polluants, respectueux de la santé et de l’environnement. Membre de l’association One Voice, Kibio refuse tout test sur animaux. En outre, à partir de 2011, le verre infini (100 % recyclé et 100 % recyclable) va remplacer les emballages en verre classique, et les notices seront exclusivement imprimées au dos des étuis. « Nous allons lancer un produit dans ce verre infini, véritable prouesse technologique, courant septembre, en partenariat avec Saint-Gobin-Desjonquères », précise-t-on chez Kibio. Jusque dans sa PLV et dans ses éditions de documents, Kibio utilise des mono-matériaux pour faciliter le recyclage, des matériaux vertueux comme le coton bio ou le lin, du vernis acrylique, des encres végétales, du papier PEFC ou FSC*… Le laboratoire utilise exclusivement du papier « bagasse » (fabriqué sans arbre) pour ses supports de communication et étudie la possibilité d’en faire usage pour ses étuis. Un engagement qui n’a pas laissé insensible le groupe Clarins, justement investi dans ce qu’il appelle des « engagements responsables ». Entré à hauteur de 10 % du capital en 2006, Clarins a pris l’ensemble des parts en fin d’année dernière.
1 % pour la planète.
Le groupe Léa Nature pousse la responsabilité environnementale à son paroxysme. On parle ainsi d’emballages justes et nécessaires, de production propre (limitation de l’impact environnemental en termes de rejet, de consommation d’énergie et de nuisances sonores ; tri et valorisation des déchets allant jusqu’à posséder sa propre déchetterie en interne et à créer une filière de compostage), d’énergies renouvelables privilégiées (éco-matériaux, panneaux solaires et photovoltaïques). Par ailleurs, il soutient des associations et projets engagés dans la solidarité internationale et nationale, la santé, l’enfance et la culture. La philosophie du groupe et de ses marques (Lift’Argan, Natessance, Biosystem…) touche un large réseau de distribution, dont 1 500 pharmacies. « Nous leur proposons systématiquement des formations en phytothérapie et en cosmétique bio. Notre chiffre d’affaires 2009 en pharmacie s’élève à 1,6 million d’euros, sachant que nous avons 170 références réservées à l’officine », précise Mirelle Lizot, responsable de la communication du groupe. L’engagement environnemental se traduit également par l’adhésion de quatre de ses filiales (dont les Laboratoires Natescience) au Club 1 % pour la planète depuis 2007. Concrètement, elles reversent chaque année 1 % de leur chiffre d’affaires à l’association Terre et Humanisme. Chacune des marques a sa particularité en termes de développement durable. Ainsi, Lift’Argan soutient des projets locaux de lutte contre la désertification et l’exode rural, et donc pour la préservation de l’argan, seule source de revenus pour certains villages du sud-ouest marocain.
Partenaires équitables.
Autre laboratoire fortement engagé, Weleda garantit des produits respectueux de l’être humain, utilisant la culture biodynamique (qui exclut les engrais chimiques et autres produits phytosanitaires) pour la culture des plantes médicinales et le respect de la protection des espèces lors de la cueillette des plantes à l’état sauvage. Le président du directoire, Patrick Sirdey, l’exprime ainsi : « Toute activité humaine ayant un impact sur l’environnement, il est inconcevable à l’heure actuelle de proposer des produits, aussi naturels soient-ils, sans nous soucier de leur incidence en amont et en aval de la chaîne de production. » Et celui-ci d’ajouter : « Une entreprise qui incarne et fait vivre les valeurs du développement durable depuis sa fondation en 1921 a toutes les raisons d’envisager l’avenir avec confiance et sérénité. » Assurant sa production végétale depuis 1924, et s’assurant de la régénération des plantes sauvages lors de cueillettes, Weleda a publié, en 2009, sa Déclaration environnementale internationale. Elle institue notamment les standards environnementaux communs pour toutes les sociétés du groupe. Le laboratoire a même développé un réseau de partenaires équitables au plan international : non seulement la qualité des matières premières est plus que jamais requise, mais aussi la préservation de la biodiversité et le respect de minima sociaux. Des exigences qui s’ajoutent aux projets plus conventionnels de valorisation des déchets ou de réduction des émissions de gaz à effets de serre, ainsi qu’aux projets locaux. C’est ainsi qu’est né le partenariat avec la Fondation Maud Fontenoy, engagée pour la protection de la mer et des océans. Le groupe, versé dans la protection de la terre et des plantes, a créé, en collaboration avec la Fondation, un doudou marin en coton bio et issu du commerce équitable. Les recettes émanant de sa vente (en pharmacie et parapharmacie) sont reversées à l’association et financent des actions pédagogiques pour préserver la biodiversité marine.
Label Pharmacie durable.
Plus discrets les Laboratoires Pierre Fabre se sont distingués pour la 2e année consécutive en remportant le prix Pierre Potier 2010 de l’innovation en chimie en faveur du développement durable. Ils ont en effet mis au point le sélectiose, utilisé dans la ligne de soins TriXéra+ (Avène). Un produit non seulement efficace, mais aussi peu polluant lors de sa fabrication et de sa production.
Tout comme les laboratoires, les grossistes répartiteurs sont des entreprises durables. OCP le prouve avec l’ouverture, en fin d’année dernière, du site OCP Breizh. Tout en ayant pour vocation de regrouper les activités des établissements de Brest, Lorient et Saint-Brieuc, et de couvrir un secteur de 750 pharmacies et 60 établissements hospitaliers, OCP Breizh a aussi intégré les principes du Grenelle de l’environnement. Au programme : récupération des eaux de pluie, baisse de la consommation électrique, production d’énergie renouvelable, flotte de véhicules de livraison au biocarburant, optimisation des tournées. Par ailleurs, OCP a rejoint le projet PharmeCO2, au même titre que son concurrent Alliance Healthcare, mais aussi le laboratoire Janssen Cilag, le fabricant d’emballages Laminar Medica et le dépositaire Depolabo. Ensemble, ils ont réduit les émissions de dioxyde de carbone liés à l’emballage et au transport des médicaments soumis aux contraintes de la chaîne du froid.
Les groupements et enseignes ne sont pas en reste. Créé par le groupe PHR et validé en janvier 2009 par le Bureau Veritas Certification France, le label Pharmacie Durable comprend trois volets : social, environnemental et santé. « Les officines qui souhaitent l’obtenir s’engagent dans une véritable démarche d’amélioration continue. Il faut au minimum un an pour être labellisé. Sept pharmacies, les toutes premières, le sont depuis le 18 août et une trentaine sont engagées dans la démarche », se félicite Lydie Duchêne, responsable développement durable du groupe PHR. Les pharmaciens commencent par suivre une formation sur le développement durable, la pharmacie durable et le référentiel, afin de savoir ce qui doit être mis en place. « Nous organisons six formations par semestre à Paris et en région. Un diagnostic est ensuite réalisé au sein des officines, pour qu’elles sachent où elles en sont et ce qu’elles vont devoir réaliser. On définit la politique qui va être menée sur les trois prochaines années. Un certain nombre de critères doivent être mis en place au cours de la première année et permettent d’obtenir le label, mais d’autres font partie des choix propres à chaque officine. » Un audit interne après six mois de travail permet d’évaluer si l’officine a suivi les recommandations dans le temps imparti et si elle peut être présentée à un audit externe six mois plus tard pour l’obtention du label.
Défi pour la Terre.
L’enseigne GIPHAR se démarque par son investissement de longue date. Dès 2003, elle a mis en place un cycle de conférences animées par Jean-Marie Pelt sur le thème de la santé et de l’environnement. Depuis 2006, elle est partenaire de la Fondation Nicolas Hulot et relaye assidûment « Défi pour la terre », une action pédagogique qui rappelle les éco-gestes quotidiens.
Quant aux officinaux, certains ont récemment fait parler d’eux, comme Éric Gendrin, titulaire à Iffendic, en Ille-et-Vilaine, récompensé en juin dernier du prix Pharmacie et Santé durable aux Grands Prix de la Pharmacie organisés par le « Quotidien du Pharmacien ». Son credo ? Tri sélectif des déchets, impression recto verso des feuilles de papier, achats de fourniture et consommables mieux réfléchis, sensibilisation du public à la récupération des MNU, installation de plus de 35 m² de panneaux photovoltaïques dont le surplus d’énergie est revendu à EDF. Éric Gendrin a aussi mis en place une charte écologique que ses collaborateurs doivent respecter.
Le développement durable induit un changement des modes de consommation qui influent sur la destruction ou la préservation des ressources naturelles mondiales. La plupart des entreprises développent aujourd’hui un tel discours, non seulement pour améliorer leur image et répondre à la pression des consommateurs, mais aussi pour réduire leurs charges. L’officine aussi a tout à y gagner.
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