POUR SA PREMIÈRE année d’activité, le P3S a traité 4 795 requêtes des usagers du système de santé, à la suite d’appels téléphoniques, de courriers et de mails qui signalent des manquements divers aux droits des malades et à la sécurité des soins. Le phénomène, constate le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, n’est plus nié. Il se présente diversement, avec des violences exercées sous des formes multiples sur des personnes vulnérables : violences morales (ordres, interdictions, reproches, indifférence, privation de visites, humiliation, infantilisation...), violences par excès et négligences (absence de prise en compte de la douleur, acharnement thérapeutique, excès de médicaments), violences physiques (toilettes imposées, gifles, sévices sexuels...), violences matérielles (vols d’argent ou d’objets, matériel inadapté...), non-respect du consentement.
Moins visible que ces actes qui « portent gravement atteinte, de manière volontaire ou involontaire, aux droits fondamentaux, aux libertés civiles, à l’intégrité corporelle, à la dignité ou au bien-être général » (définition proposée par le Conseil de l’Europe), la maltraitance dite ordinaire, estime M. Delevoye, est « tout aussi inacceptable ». Elle se fait « insidieuse et systématique, se banalisant au sein des établissements de soins où elle devient difficile à dénoncer ».
Les situations qui relèvent de cette maltraitance concernent près de 8 % des cas examinés par le P3S, tandis qu’«en réalité une situation de maltraitance a été identifiée dans pas moins d’une requête sur deux ». La liste en est aussi longue qu’édifiante : attentes interminables des familles, avant d’être conduites auprès de leurs proches hospitalisés, mépris social dans les modalités de délivrance de l’information, sentiment d’un désintérêt, ou d’une attitude méprisante de la part du personnel, patient abordé avec des paroles humiliantes, entraves et contraintes mises en place pour le confort des personnels, besoins primaires pas toujours respectés (soif, faim, sommeil), douleur trop souvent minimisée, parfois ridiculisée, atteintes à l’intimité corporelle, problèmes récurrents concernant le recueil des selles (couches imposées).
60 réclamations de personnels de santé.
Le rapport constate l’existence d’un « climat de méfiance réciproque », source de conflit qui « induit des attitudes d’autoprotection de la part des professionnels et l’émergence de comportements agressifs de la part des usagers ». En 2009, le P3S a ainsi recueilli près de 60 réclamations émanant des personnels de santé, victimes d’incivilités, propos violents ou obscènes, menaces, inti?midations, humiliations, voire, plus rarement, des coups. Et il souligne que « ce serait faire offense à l’ensemble de la profession médicale que de nier le non-respect d’autrui qui prolifère dans les établissements de santé et la violence subie par les professionnels ». Il analyse les phénomènes de transfert d’agressivité : « L’agression physique du professionnel de santé a toujours de lourdes conséquences psychiques. Souvent la culpabilité ressentie par le soignant, qui croit n’avoir pas fait ce qu’il fallait pour assurer sa propre protection, cohabite avec le sentiment de solitude et d’abandon. Les personnels ressentent de plus en plus durement cette tension et ils ont l’impression de ne plus être respectés par les patients. Ces situations représentent une contrainte psychique majeure qui peut aboutir au burn out des individus et à des comportements déviants pouvant mettre en défaut la continuité et la sécurité des soins. »
Le médiateur se fait néanmoins l’écho des efforts déployés de diverses parts pour assurer la promotion des droits des malades et la bientraitance, à l’initiative, indique-t-il, de la FHF (Fédération hospitalière de France, de la HAS (Haute Autorité de santé), ou de l’ANESM (Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux).
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