AVEC 52 adhérents pour 65 officines, le syndicat départemental de la Creuse (FSPF) peut se targuer d’un taux de syndicalisation plus que satisfaisant, issu d’une action dynamique menée par le bureau. Mais ce chiffre révèle également les effectifs très modestes – liés à une faible densité démographique – d’une profession déjà fragilisée par différents phénomènes. Pour son responsable, Frank Nicoulaud, 40 ans, installé à Gouzon depuis 2003, la carence en médecins, généralistes et spécialistes, s’avère être le danger premier ; la création de pôles de santé en milieu rural restant le remède le plus efficace pour y remédier.
Risque de déstructuration du réseau.
« Ici, nous avons, depuis octobre dernier, la toute première maison médicale ouverte sur le département, explique-t-il. La commune a pris en compte les besoins de sa population, qui, lors d’un sondage local, avait placé en seconde position de ses préoccupations, la santé. Abritant des généralistes, des infirmières, des kinés, un dentiste, la nouvelle structure est une première réponse aux problèmes de dépeuplement, et aux carences médicales. Pour le pharmacien, elle devient également un élément de développement, avec, cependant, certaines limites dues paradoxalement à sa création. »
Se fondant sur une étude réalisée récemment dans le département, avec une projection à cinq ans, le président du syndicat observe avec inquiétude les prévisions catastrophiques à court terme, notamment liées à la pénurie de généralistes, mais aussi à l’absence de structures sur place. « Résumons, analyse Frank Nicoulaud. Pas de maison médicale, donc pas de médecins, puisque c’est le seul moteur qui attire actuellement les candidatures à l’implantation. Mais, d’un autre côté, ces mêmes maisons n’offrent aucune garantie d’avenir, des intérêts limités pour les jeunes, et risquent, à moyen terme, de déstructurer le réseau de santé plutôt que de l’étoffer. Ainsi, un généraliste déjà en place, tenté de la rejoindre, laissera son poste vacant sur place. Ce n’est donc pas la panacée. Tant qu’il n’y aura pas de mesure coercitive sur l’installation, on ne répondra pas à la menace de la pénurie médicale dans certaines régions. Ici, on estime être très concernés dans les cinq prochaines années si rien n’est fait. »
Pharmaciens en pays vert.
L’attractivité des territoires s’exerce de façon différenciée selon les professions, souligne le président de département. Si les jeunes généralistes s’intéressent plutôt aux bords de mer et aux villes à haute densité démographique, les potards, quant à eux, sont loin de bouder l’implantation en milieu rural, pour peu qu’ils y dénichent une officine suffisamment viable. « Bien sûr, on n’importera pas l’océan en Creuse, concède-t-il, mais les jeunes installés sur le département sont loin de se plaindre de leur mode de vie. L’ennui, c’est que cela ne se sait pas, et que la Creuse pâtit d’une mauvaise image de terre d’exil ou de lieu reculé. Nous n’avons pas, quant à nous, de problème démographique, le nombre d’officines étant proportionnel au nombre d’habitants et nous constatons que les jeunes nous rejoignant sont souvent du pays. L’étude précitée le prouve : les pharmacies répondent très bien aux besoins de la population, et les regroupements ne sont pas ici un avantage, le réseau actuel étant satisfaisant. Le service de santé est rendu pour notre part, mais le danger subsiste, lié à la démographie creusoise et, surtout, pour y revenir, à la baisse des effectifs des généralistes. D’autant plus que le phénomène ne pourra que s’accélérer. »
Une courbe démographique en voie d’inversion.
Les élus se sont penchés sur le problème, inquiets de la dérive : mis à part les généralistes, on manque aussi en Creuse de spécialistes, de dentistes, (pas un seul implanté depuis deux ans, hormis celui de la maison médicale de Gouzon), tandis que se multiplient les arrivées de retraités et que la pyramide des âges s’inverse.
Territoire européen recélant proportionnellement le plus de personnes de plus de 65 ans, le département restera fragile en moyens médicaux, face à une demande qui ne pourra que s’amplifier. D’autant plus que le dernier recensement fait apparaître, pour la première fois depuis un siècle, un équilibre entre décès-départs et naissances-arrivées. La Creuse serait en cours d’inversion de sa courbe démographique, même si elle tend à une certaine stabilisation liée à ses attraits écologiques.
« Si je devais lancer un appel vers les jeunes futurs pharmaciens, je dirais que nous avons ici les moyens de nos ambitions, affirme Frank Nicoulaud. Nous travaillons dans des conditions correctes, développant des secteurs valorisants comme l’orthopédie, le maintien à domicile, les services à la personne qui explosent. Le pharmacien reste l’interlocuteur privilégié, le conseiller médical, qui affiche un taux de satisfaction de 93 % auprès de sa clientèle. Côté caisses, Ordre, informatisation, carte Vitale, génériques, tours de garde, sécurité, nous ne relevons aucun souci majeur. Nous avons la notion du service, et avons été précurseurs en matière de récupération des déchets, malgré des situations géographiques parfois difficiles, nous n’avons pas de pharmaciens en faillite et, pour l’instant, l’immobilier officinal trouve preneur. Mais, en regard de tout ce qui précède, l’avenir reste préoccupant. »
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