MALGRÉ une petite valse de dernière minute entre les syndicats qui décident d’entrer dans le mouvement de grève et ceux qui lèvent finalement leur préavis, la grogne des médecins reste bien généralisée. Et les revendications n’ont pas changé. La future loi de santé de Marisol Touraine, qui doit être débattue au printemps, attise toujours la colère, en particulier la mesure instaurant le tiers payant généralisé obligatoire en 2017. Mais pas seulement. La reprise en main par l’État, à travers les agences régionales de santé (ARS) de l’organisation du système de santé libéral est vécue par les médecins comme une mainmise sur leur activité. La loi de santé prévoit également des délégations de tâches vers d’autres professions de santé, ce qui donne le sentiment aux praticiens d’assister au démantèlement de leur métier. À cela s’ajoutent les négociations en berne quant à une revalorisation du tarif de la consultation. C’est dans ce contexte que les syndicats ont annoncé plusieurs mouvements de contestation, dont certains ont débuté lundi dernier. La ministre de la Santé a finalement décidé de recevoir Frédéric Valletoux (FHF), puis Claude Leicher (MG France) mardi, Jean-Paul Ortiz (CSMF) mercredi et un représentant du Front généraliste sera reçu lundi prochain.
Forte mobilisation.
La grève des gardes et la fermeture des cabinets, du 24 au 31 décembre, a remporté un vif succès selon les syndicats. Pour la journée du 24 décembre, la Confédération des syndicats médicaux de France (CSMF) comptabilise plus de 70 % des médecins ayant baissé le rideau en France, mais certaines régions dépassent les 80 % de mobilisation. Cinq jours plus tard, l’Union nationale des omnipraticiens français (UNOF) compte 80 à 100 % des médecins en grève, la continuité des soins étant assurée par les médecins réquisitionnés dans l’urgence par les ARS.
« Dans tous les centres 15 de France, les records du nombre d’appels reçus par jour ont été pulvérisés : deux à trois fois plus d’appels que les maximums jusque-là enregistrés. » Le même jour, la ministre de la Santé annonçait pourtant qu’elle ne constatait « aucune difficulté d’accès aux soins », même si « dans certains endroits, il y a des appels plus nombreux aux centres 15 », remarquant même une stabilité de la fréquentation des urgences à la période des fêtes de fin d’année entre 2013 et 2014. Deux jours plus tôt, la Direction générale de la santé (DGS) ne constatait « aucune affluence anormale dans les services d’urgence ».
Guerre des chiffres.
Mais c’est la Caisse nationale d’Assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) qui a lancé un pavé dans la mare le 2 janvier, en publiant les statistiques de télétransmission des feuilles de soins à la fin de l’année. Du mercredi 24 au mercredi 31 décembre, 4,21 millions de télétransmissions ont été enregistrées, contre 3,89 millions en 2013, ce qui signifierait qu’il y a eu plus de consultations que l’année précédente… Avant même ces annonces contradictoires, SOS Médecins, qui a décidé de se joindre à la grève tardivement, particulièrement sollicité par les ARS dans leurs réquisitions, a même sommé la ministre de la santé d’arrêter de « mentir », affirmant que « les SAMU-Centre 15 sont entièrement saturés avec des temps d’attente téléphoniques déraisonnables » et que les urgences hospitalières sont débordées.
Cette guerre des chiffres entre les médecins et le gouvernement n’apaise pas les relations. Comme prévu, d’autres mouvements ont commencé ce lundi 5 janvier. MG France a appelé à une « grève administrative portant sur les téléservices de l’assurance-maladie (arrêts de travail en ligne, etc.) et la transmission des feuilles de soins électroniques ». Le syndicat avait fixé, dès le 2 octobre dernier, une nouvelle journée de grève le mardi 6 janvier, date anniversaire de la dernière revalorisation de la consultation qui remonte à quatre ans. De leur côté, le Syndicat des médecins libéraux (SML) et le syndicat d’hospitaliers Le Bloc ont appelé à la grève le lundi 5 janvier. Le SML invite aussi les médecins à continuer à prendre la carte Vitale, mais en envoyant systématiquement un duplicata à l’assurance-maladie afin de créer un engorgement administratif.
Retard des remboursements.
La Fédération des médecins de France (FMF) incite également à faire une feuille de soin au lieu de prendre la carte Vitale « lorsque cela ne pénalise pas le patient » et a appelé à la « grève des gardes illimitée » dès le lundi 5 janvier et à une journée de manifestation nationale. La CSMF souhaite, quant à elle, que les médecins envoient par voie postale tous les formulaires (accidents du travail, déclarations de médecin traitant, etc.). Elle annonce d’autres « actions coups de poing » qui seront détaillées ultérieurement. En parallèle, des manifestations sont organisées, comme à Lyon, où 450 hospitaliers se sont réunis devant l’ARS Rhône-Alpes lundi, à l’appel du syndicat Le Bloc, pour rappeler les points de désaccord avec la future loi de santé et brûler le cercueil de la médecine libérale.
Lundi matin, le président de la République François Hollande a déclaré sur France Inter « comprendre les médecins » et leur a promis de faire « plus simple », « plus efficace » dans le traitement des demandes de remboursement. Une promesse déjà faite par Marisol Touraine fin décembre lorsqu’elle a annoncé la mise en place, début janvier, d’un groupe de travail sur le tiers payant pour « le rendre le plus simple possible ». Pour autant, la ministre confirme sa volonté de mener à bien cette réforme par la loi de santé, pour permettre aux patients de ne plus avancer le prix de la consultation, « comme ils le font chez le pharmacien, (…) à l’hôpital ». Quant à la grève administrative annoncée, Marisol Touraine craint que les patients soient pénalisés. L’Assurance-maladie a d’ailleurs indiqué dans un communiqué, samedi dernier, qu’une telle grève va entraîner des retards dans les remboursements, allant jusqu’à deux mois, voir davantage. En effet, depuis la création de la carte Vitale, les effectifs des agents traitant les feuilles de soins papier ont été divisés par dix. Un moyen de pression à manier avec délicatesse, d’autant que, selon un sondage IFOP publié par le « Journal du Dimanche », 58 % des Français jugent la grève des médecins justifiée.
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