LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN. - Vous venez d’être élue présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens. Quelles seront les priorités de votre mandat ?
ISABELLE ADENOT. - Présider le Conseil national, c’est présider toutes les sections. Les priorités seront donc définies avec l’ensemble des sections. Pour ma part, je vais plus particulièrement m’attacher à mettre en valeur le travail de l’Ordre, la spécificité de sa mission et son identité. Il s’agit pour moi de montrer que, tous métiers confondus, ce sont nos valeurs professionnelles qui nous permettent de nous distinguer d’autres acteurs. Ce sont elles qui nous attribuent la confiance du public.
Vous êtes la première femme à accéder à ce poste. Cela peut-il changer la façon de présider l’Ordre ?
Cela fait longtemps que je ne me pose plus la question sur la différence de présider entre les hommes et les femmes. Pour moi, les confrères voient davantage le pharmacien et la façon dont on défend certains dossiers. Peu importe si les idées sont portées par un homme ou par une femme. L’essentiel pour les confrères est de se retrouver dans les convictions portées.
Quelles sont, selon vous, les limites entre les activités ordinale et syndicale ?
L’Ordre possède ses missions propres définies par la loi, tel le respect de l’indépendance professionnelle. Les syndicats, eux, ont notamment en charge la défense économique. Bien évidemment, syndicats et Ordre se retrouvent sur certains dossiers et nous devons travailler ensemble.
Même si cela est du ressort des organisations syndicales, l’Ordre est toutefois attentif aux questions économiques, surtout lorsqu’une profession souffre, comme c’est le cas actuellement. Car c’est souvent dans les situations difficiles que les dérives sont observées. Je rappelle au passage que tous les élus ordinaux sont en exercice. Ils ont donc conscience des réalités du terrain, puisqu’ils les vivent comme tous les pharmaciens.
Dans ce contexte, et malgré toutes les contraintes qui s’imposent à la profession, comment justement conserver un service de qualité ?
La qualité de service et la proximité font partie de l’histoire de la profession : c’est son passé, son présent, et ce sera son avenir. Elle est une obligation, car c’est elle qui nous attribue la confiance du public. Dans le contexte économique actuel, préserver la qualité passe parfois par un regroupement des moyens. L’industrie procède à des fusions, les biologistes ont mis en place une organisation autour de plusieurs sites, les hôpitaux se dirigent vers des communautés hospitalières. Alors, comment imaginer que les pharmaciens d’officine restent seuls dans leur coin ? Pour y parvenir, il existe différentes solutions, tel l’exercice en société ou le partage de services entre officines. Économiquement parlant, pour certains, il faudra passer par là. Nous serons force de proposition sur ce dossier car cela touche de très près à l’indépendance professionnelle.
Où en est le projet de décret sur les SEL et les holdings ?
Les sections concernées sont au travail et l’on devrait pouvoir présenter des propositions à l’automne. Le projet ordinal s’attache à donner la possibilité aux officinaux de créer des sociétés de participation financière de professions libérales (SPF-PL). En ce qui concerne les SEL, il doit permettre davantage de fluidité dans les ventes et les achats de parts sociales, pour permettre aux jeunes d’entrer et sortir facilement du capital de ces sociétés. Je suis d’ailleurs scandalisée de l’attitude de certaines banques qui demandent actuellement de telles garanties aux jeunes que cela ne facilite pas leur installation.
Reprendrez-vous l’idée, avancées par Jean Parrot, de créer des pharmacies mères et des pharmacies filles ?
Cette sémantique peut surprendre certains. En effet, ces termes juridiques peuvent laisser à penser que certaines pharmacies seraient supérieures à d’autres. Que trois ou quatre pharmacies soient regroupées au sein d’une même société ou d’un même groupe, cela ne doit pas poser de problème. Mais, dans l’esprit de tous, il faut que la qualité de service et l’indépendance professionnelle soient identiques dans chacune d’entre elles.
La récente revendication du Collectif des groupements de pouvoir communiquer vous semble-t-elle légitime ?
La communication fait partie intégrante de notre société et de notre temps. Cela ne me choque pas. Mais, c’est la manière qui compte. Nous pensons que certaines communications peuvent ainsi laisser à penser qu’il y aurait des réseaux dans le réseau. Des campagnes peuvent même apparaître discriminatoires vis-à-vis de certains confrères : une partie du réseau serait capable de faire telle ou telle chose, sous entendant que l’autre ne le serait pas, alors qu’elle le fait aussi. Cela ne nous semble pas possible. Alors, soyons clairs, des actions en justice ont été engagées par mon prédécesseur, et je les poursuivrai.
À propos de communication, certains reprochent à l’Ordre sa campagne grand public pour le dossier pharmaceutique (DP), arguant justement qu’elle ferait la promotion d’un sous réseau. Que leur répondez-vous ?
La grande différence est que le DP est désormais une obligation pour tous les pharmaciens. Tous devraient normalement être en mesure de le proposer. Toutefois, nous avons souhaité laisser le temps aux confrères de s’équiper car nous avons conscience des difficultés rencontrées par certains d’entre eux dont la priorité aujourd’hui n’est pas forcément d’adapter leur système informatique. Quoi qu’il en soit, les patients souhaitent connaître les pharmacies proposant le DP, outil qui sécurise la dispensation de leurs traitements. Je me suis toujours opposée fermement à la diffusion d’une liste des officines où le DP est en place. En revanche, nous avons accepté l’idée que les patients puissent les identifier. Voilà pourquoi, nous avons proposé l’apposition d’un macaron sur les vitrines. La vitesse actuelle de déploiement rendra très vite cette question caduque.
Je tiens également à préciser que nous avions informé auparavant les pharmaciens non équipés du lancement de cette campagne, en les incitant à déployer le DP chez eux. Mais il faut aussi comprendre que le DP est un outil professionnel nous permettant de creuser l’écart dans le domaine de la qualité. Et nous devons le faire savoir aux patients.
Autre polémique actuelle, Jean-Luc Audhoui vient d’annoncer qu’il déposait un recours en annulation concernant les dernières élections au Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens d’Ile-de-France, qui peut, s’il aboutit, remettre en cause votre propre élection. Comment réagissez-vous à cette annonce ?
M. Audhoui est libre de ses actes. C’est par voie de presse que j’ai appris qu’il a déposé un recours. Les autorités saisies feront ce qu’elles ont à faire. Et j’attends le résultat. Je reste très sereine.
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