« LA PREMIÈRE FOIS que je suis entrée dans les vestiaires, c’était moi la plus gênée », se souvient Françoise Othats-Pontacq. En effet, pour cette pharmacienne d’Oloron Sainte-Marie (Pyrénées Atlantiques), la présidence du club de rugby local était un beau challenge qu’elle a relevé avec brio. Avant de jeter l’éponge, cet été pour que sa passion du ballon ovale ne supplante sa vocation pour l’officine.
Une vocation découverte très tôt. « J’ai choisi le métier de pharmacienne en seconde et je m’y suis tenue », explique-t-elle. À l’université, sa passion se confirme. Et, en 1984, diplôme en poche, elle rentre en Béarn, comme assistante dans une officine d’Oloron. Elle y reste jusqu’en 1992, date à laquelle elle accepte de devenir associée dans une autre officine de la ville. Mais trois semaines plus tard, son associée décède. Enceinte, elle retourne chez son banquier et reprend l’intégralité de l’officine. Douze ans plus tard, elle décide un transfert et construit « sa » pharmacie : « J’ai voulu une officine qui me ressemble, où les gens se sentent bien. » D’où le recours à de beaux matériaux : parquets, boiseries, éclairages doux… La réussite est au rendez-vous : l’officine emploie aujourd’hui 17 salariés.
Parallèlement, Françoise Othats-Pontacq s’investit dans diverses associations culturelles, mais le rugby sera sa grande passion : « A la fac de pharmacie, j’étais une groupie de l’équipe de rugby, j’assistais aux matches et aux troisièmes mi-temps ! Le dimanche, à Oloron, j’allais au stade avec ma maman. Beaucoup de mes amis jouaient FCO*, prononcer Fécéo. J’étais une fervente supportrice. » Elle épousera même un rugbyman…
En 1995, le club lui demande d’intégrer sa commission médicale. Une mission bénévole et variée : contrôler les pharmacies des équipes, coordonner les soins des joueurs (médecin, kiné) et parfois prodiguer des premiers soins…
En 2008, au départ du président, on lui propose d’assurer la succession comme coprésidente. Elle relève le défi. Les dirigeantes sont rares, surtout à ce niveau ; Oloron évolue en Fédérale 1 (troisième division nationale) et compte 400 licenciés.
Une aventure humaine.
Très vite, le courant passe : « Les contacts avec les joueurs étaient simples et vrais. J’étais un peu leur maman, certains m’appelaient « tati ». J’ai toujours ressenti énormément de respect. »
De son côté, l’implication est totale : « Le samedi j’allais voir jouer les jeunes, le dimanche j’accompagnais les équipes seniors au stade ou en déplacements. La semaine, dans l’officine, j’enchaînais les rendez-vous et les coups de fil rugby ; au comptoir, on refaisait les matchs… Le soir, c’étaient les réunions, le site Internet du club, les interviews dans les médias… Une aventure humaine incroyable ! »
Une tâche exaltante qui l’éloigne de l’officine. D’où sa décision, en juillet dernier, d’abandonner toute fonction au club : « C’est très dur de tout mener de front. J’ai eu l’impression de passer à côté de quelque chose dans mon officine. Un chef d’entreprise responsable doit savoir dire stop. Aussi j’ai décidé de me recentrer sur l’officine, son personnel, mes deux enfants et moi-même. »
Nostalgie.
Une officine qu’elle ne reconnaît plus : « L’idéal de la pharmacie de mes débuts est bien loin. Le travail administratif m’éloigne du cœur de mon métier : le contact avec ma patientèle, le lien affectif, la possibilité d’apporter ce que le médecin ne peut donner : temps, écoute, conseil… La pharmacie est en mutation et on ne sait de quoi son avenir sera fait. Je plains les jeunes pharmaciens. Heureusement, nos clients nous soutiennent et ne semblent pas prêts à acheter leurs médicaments en grandes surfaces. »
Côté rugby, Françoise Othats-Pontacq est en sevrage : « Depuis le début de la saison, je n’ai assisté qu’à un match. C’est trop dur. Il vaut mieux quitter complètement quand on a connu l’adrénaline du terrain, les grondements du stade… »
La nostalgie est là. Et l’amour presque romantique pour le rugby de clocher : « Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait en pure bénévole et avec le cœur. Oloron figure parmi les derniers clubs intégralement amateurs à son niveau, c’est ce qui fait sa richesse humaine. Même si cela nous vaut le mépris de clubs plus riches qui nous traitent de bouseux. »
On le voit, dans le rugby, comme dans l’officine, le monde change. Les traditions qui ont fait l’esprit de ces disciplines sont moquées. Et leur avenir se décide ailleurs, loin du patient, du comptoir ou des terrains ; dans un univers où la froideur numérique remplace la chaleur humaine, où la finance met au pas le french flair et en bouteille le rugby champagne.
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