PLUS QUE quelques jours, et les entretiens pharmaceutiques seront devenus une réalité dans les officines françaises. En attendant la publication au « Journal officiel » de l’avenant signé le 10 janvier sur les modalités de l’accompagnement des patients sous AVK, le « Quotidien » présente les résultats de l’enquête sur cette nouvelle mission menée par le Groupe Marketing Global (GMG) auprès d’un millier de pharmaciens*. Une large majorité d’entre eux (86 %) estiment avoir besoin d’être formés aux entretiens pharmaceutiques, en particulier aux domaines thérapeutiques prévus dans la convention pharmaceutique (anticoagulants, diabète, l’asthme), mais aussi à des problématiques qu’ils rencontrent au quotidien (oncologie, hypertension artérielle, pathologies lourdes). Les pharmaciens affichent une nette préférence pour des formations en présentiel (67,3 %) plutôt que par des modules à distance, bien que cette option gagne du terrain. Pour autant, la « durée idéale de formation » correspond à de courtes séances de 30 minutes (30,9 %) ou une heure (25,5 %). Ils sont néanmoins près de 20 % à demander une formation d’une demi-journée, voire d’une journée entière (16,5 %).
Afin de les aider dans la mise en place des entretiens pharmaceutiques, les officinaux attendent beaucoup de l’Ordre national des pharmaciens : une campagne de communication pour 43,2 % d’entre eux, des réunions organisées en région (39,8 %) et un suivi de qualité des actions menées (25,6 %). Ils sont également dans l’attente d’un soutien important de la part des laboratoires pharmaceutiques. Ainsi, « tout outil pour mettre en place le suivi » des patients dans leur traitement sera le bienvenu (36,2 %). Ils suggèrent également de les intégrer à un programme d’apprentissage et d’accompagnement patient, et espèrent être épaulés dans le suivi d’observance des traitements. Les officinaux sont d’ailleurs persuadés (73 %) qu’un soutien continu sera nécessaire dans le cadre des entretiens pharmaceutiques, que ce soit via Internet (43 %), en direct avec un formateur/conseiller (36 %) ou par contact téléphonique (16 %).
« Les pharmaciens ont compris que l’évolution du mode de rémunération passe par la convention pharmaceutique et le développement des génériques, ils veulent désormais être aidés et formés pour les entretiens pharmaceutiques », analyse Alain Neddam, président de GMG.
Patients experts.
De son côté, le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP), se réjouit d’une reconnaissance de l’officinal « dans l’accompagnement du patient et la valorisation de sa mission de santé publique », note Michel Laspougeas, membre du bureau du conseil central A (titulaires) et référent loi HPST. Pour lui, la convention pharmaceutique « confirme les perspectives ouvertes par la loi Hôpital, patients, santé et territoires », notamment la compétence scientifique et la disponibilité des pharmaciens, l’amélioration de la sécurisation de la dispensation, la prise en compte du patient dans son environnement…
Cette nouvelle orientation de la pharmacie n’est pas pour déplaire aux associations de patients, comme le souligne Alain Olympie, directeur de l’Association François Aupetit (AFA) qui représente notamment les malades atteints de maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI). « Le pharmacien conscient qu’il doit avant tout écouter et repérer, puis orienter, a tout compris. Mais cela demande du temps. C’est ce que nous attendons de lui dans le cadre de l’éducation thérapeutique du patient (ETP). » Au-delà de l’accompagnement du patient et des entretiens pharmaceutiques, les pharmaciens peuvent aider les malades atteints de pathologies chroniques à devenir des patients experts. « Nous multiplions les programmes d’ETP pour les malades, mais ces programmes sont d’abord hospitaliers et notre but est de créer un véritable réseau d’ETP en ville. » Ce programme de 42 heures, appelé Coproduction en éducation thérapeutique pour les malades atteints de MICI (CET-MA-MICI), est soutenu par l’assurance-maladie. L’occasion pour l’AFA de souligner l’avantage à intégrer les officinaux dans une équipe d’ETP : proximité, accessibilité et disponibilité, connaissance globale du patient, confiance du patient. Il reste néanmoins des points à améliorer en terme de confidentialité. « Le pharmacien instaure une relation naturelle avec le patient, il n’est pas prescripteur et son rôle de conseil est bien perçu. »
Liens d’intérêt.
Conscients du rôle à jouer des pharmaciens dans le suivi des patients et de leurs attentes en matière de formation, les industriels se disent prêts à apporter leur soutien, mais tout est question de dosage. « Dans un même groupe pharmaceutique, les réponses sont variables selon les unités, les spécialités, les pathologies plus ou moins sévères ou chroniques et selon l’apport du pharmacien dans la pathologie donnée. L’intention est bien là mais diffère selon la place du pharmacien dans le parcours de soin », indique Jean-Pierre Favier, de Janssen-Cilag. Un rôle que l’industrie a du mal à endosser aussi à cause d’un contexte où tout est sujet à conflits d’intérêts, comme le remarque Alain Olympie. « La loi a été détournée, elle demande la transparence sur les liens d’intérêts et, aujourd’hui, on ne parle que de conflits d’intérêt. Un lien n’est pas un conflit ! »
Les fondations vers une nouvelle pharmacie très impliquée dans le suivi et l’éducation des patients sont aujourd’hui posées. C’est le début d’une histoire qui doit s’écrire avec le soutien de tous les acteurs du médicament et en toute transparence, dans l’intérêt du patient. Une histoire qui s’inscrit dans la continuité puisque, comme le rappelle le CESPHARM, « l’éducation à la santé est une obligation déontologique pour le pharmacien, comme le précise l’article R. 4235-2 du Code de la santé publique : le pharmacien doit contribuer à l’information et à l’éducation du public en matière sanitaire et sociale ».
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