Immortel depuis déjà quarante-deux ans, Jean d’Ormesson, 90 ans, continue de faire l’actualité : après que ses « Œuvres » (1) ont été publiées dans la Pléiade en avril dernier, et avant que sorte, en janvier et toujours chez Gallimard, un gros livre de souvenirs intitulé « Je dirai malgré tout que cette vie fut belle », on peut se plonger dans un recueil de ses articles – essentiellement politiques – réunis sous le titre « Dieu, les affaires et nous » (2). Cette « Chronique d’un demi-siècle », qui s’étend en fait de 1981 à aujourd’hui, est dominée par la personnalité de François Mitterrand, qui a été son adversaire politique et, reconnaît Jean d’Ormesson, presque un ami, tandis qu’une seconde partie regroupe les reportages à l’étranger. Observateur du monde et des hommes et femmes qui nous gouvernent, l’académicien, s’il s’est parfois trompé, est resté fidèle à son rôle de spectateur engagé mais libre, et il nous incite à faire de même.
Il est des enthousiasmes, et des émissions, qui résistent au temps. Ainsi « le Masque et la plume » (le dimanche à partir de 20 heures sur France Inter), où des critiques débattent de littérature, de cinéma et de théâtre, fleuron de la radio depuis soixante ans. L’enthousiasme est celui des journalistes qui y participent, entre pertinence et mauvaise foi. Parmi eux, « notre » critique de théâtre Armelle Héliot, et surtout Jérôme Garcin, à la tête des pages culturelles de « l’Observateur » et auteur d’une vingtaine de romans et d’essais, qui y est entré comme chroniqueur il y a trente-cinq ans et qui l’anime depuis vingt-six ans. Pour célébrer l’anniversaire de l’émission, il a choisi, avec « Nos dimanches soirs » (3), d’en retracer l’histoire sous forme d’un abécédaire où se côtoient des personnalités du monde culturel et des anecdotes de fabrication. Un ensemble original qui ne dévoile pas seulement les dessous du « Masque » mais où l’auteur tombe aussi un peu de son masque.
Qu’est-ce qu’un événement ? C’est à cette question que Charles Dantzig tente de répondre dans « Histoire de l’amour et de la haine » (4), qui n’est pas un essai mais un roman assorti de réflexions. L’événement retenu est le mouvement de 2013 contre le « mariage pour tous », la légalisation du mariage entre personnes du même sexe, qui a suscité autant de bruit que de fureur. Essayiste quand il n’est pas poète, Charles Dantzig a choisi ici de brosser le roman vrai de cet événement historique à travers les réactions de sept personnages qui l’ont vécu et/ou subi de près ou de loin, parmi lesquels un député homophobe et fier de le proclamer dans les médias et son fils secrètement gay. L’ouvrage est divisé en 24 parties à thèmes, dont chacune déroule la fiction et est suivie de réflexions sur ledit thème. Cette construction peut être déroutante, elle est en tout cas innovante et brosse le tableau d’une France qui, loin d’être libertine et tolérante, est devenue conservatrice et agressive.
Bonheurs littéraires et culinaires
Connaissant Jean-Marie Rouart comme romancier (« Avant-Guerre », prix Renaudot), essayiste (« Ils ont choisi la nuit ») et biographe (« Napoléon ou la destinée »), on se doute que ceux dont il parle dans « Ces amis qui enchantent la vie » (5) sont des écrivains. Pas moins de 120 amis français et étrangers, auteurs consacrés ou écrivains plus rares, qu’il ne se contente pas d’évoquer mais dont il présente des morceaux choisis de leurs meilleurs livres. L’hommage qu’il leur rend est celui d’un écrivain à d’autres écrivains qui l’ont conduit sur le chemin de l’écriture et qui, surtout, lui ont appris non seulement à s’évader par le rêve mais à maîtriser sa vie, à aimer, à être heureux. Une anthologie constituée en toute humilité, aussi personnelle et intime qu’une confession.
L’écrivain américain James Salter (« Un sport et un passe-temps », « Un bonheur parfait ») est mort en juin dernier. Il avait écrit avec sa femme Kay Salter un livre de miscellanées culinaires paru outre-Atlantique en 2006 et qui vient d’être traduit, « Chaque jour est un festin » (6). Autour de leur passion commune pour la cuisine et leur plaisir de recevoir pour la partager, l’ouvrage, réalisé à partir de 40 années de notes prises à deux sur la préparation des repas et les invités, est aussi à sa manière une belle leçon de vie. On y trouve, intercalés entre une quarantaine de recettes échelonnées du 1er janvier au 31 décembre, une somme d’anecdotes littéraires, culinaires, historiques ou personnelles.
À picorer selon ses goûts.
(2) Robert Laffont, 638 p., 24 euros.
(3) Grasset, 300 p., 19 euros.
(4) Grasset, 480 p., 22 euros.
(5)Robert Laffont, 906 p., 1008 p., 24 euros.
(6) La Martinière, 382 p., 22 euros.
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion