DANS QUELLE MESURE l’exposition aux substances chimiques présentes dans l’environnement, et plus particulièrement aux perturbateurs endocriniens, est-elle responsable de l’augmentation des troubles de la reproduction de l’homme, des cancers du testicule, de malformations chez le petit garçon (hypospadias, cryptorchidie), ou encore de la progression des cancers hormonodépendants que sont ceux de la prostate et du sein?? Face aux interrogations sur une possible dangerosité de substances chimiques présentes dans des produits de grande consommation, le ministère de la Santé a demandé à l’INSERM d’analyser les données disponibles. Un groupe pluridisciplinaire d’experts (épidémiologistes, toxicologues, chimistes, endocrinologues, biologistes spécialistes de la reproduction, du développement et de la génétique moléculaire) a analysé quelque 1 200 articles portant sur 5 grandes familles de substances : le bisphénol A (revêtement des boîtes de conserve, bouteilles en plastique, amalgames dentaires), les phtalates (adhésifs, revêtements de sol, détergents, produits pharmaceutiques et cosmétiques), les composés polybromés (retardateurs de flamme incorporés dans des textiles, plastiques, mousses, câbles, ordinateurs, etc.), les composés perfluorés (traitements antitaches et imperméabilisants, emballages alimentaires, revêtements antiadhésifs des poêles et casseroles...) et les parabènes (conservateurs dans les aliments, les médicaments et plus de 80 % des produits cosmétiques). Il a remis un rapport dont la synthèse est disponible sur le site de l’INSERM (www.inserm.fr).
Peu d’études épidémiologiques.
Les indices ne manquent pas quant à de possibles conséquences pour la reproduction humaine. Mais il faut, selon les experts, amplifier la recherche pour lever les incertitudes concernant les effets d’expositions combinées et permanentes à ces substances présentes de façon ubiquiste dans l’environnement humain.
Ainsi, si les recherches sur l’animal sont relativement abondantes, les études épidémiologiques sont encore trop peu nombreuses pour évaluer précisément les risques de ces composés relativement récents.
C’est sans doute sur le bisphénol A qu’on a le plus de données. Elles montrent des effets possibles sur la fonction sexuelle, les caractéristiques spermatiques et les taux d’hormone chez l’homme adulte ; les effets peuvent être transgénérationnels, liés à de faibles doses et révélés à long terme. « On ne peut pas considérer que le bisphénol A, aux doses auxquelles la population générale est exposée, soit sans dangers pour le versant masculin de la fonction de la reproduction », souligne l’expertise.
Sur les phtalates, des effets possibles sont relevés, chez l’homme, sur la distance anogénitale, l’hypospadias, la cryptorchidie (exposition in utero), les caractéristiques spermatiques et les taux hormonaux et, chez la femme, sur la puberté précoce.
On dispose de peu d’études sur les retardateurs de flamme et les composés perfluorés (surtout aux doses compatibles avec une exposition) et encore moins sur les parabènes. Et, dans ce dernier cas, si une altération de la sensibilité aux estrogènes est notée, aucun effet n’a pu être mis en évidence à ce jour.
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