Que recouvre exactement le terme vaccin universel ? Si l'acception commune est souvent celle d'un vaccin pour tout le monde, « pour le virologue, c'est un vaccin qui protège contre tous les virus de la grippe, explique le Pr Bruno Lina, du Centre national de référence (CNR) des virus des infections respiratoires (dont la grippe) à Lyon. Il s'agit de mettre en place une réponse immunitaire post-vaccinale pour que l'immunité soit à la fois durable, c'est-à-dire > 1 an, et à spectre large, les deux aspects étant intimement liés ».
Deux études ont fait parler d'elles en janvier 2018, l'une dans « Science » visant à renforcer la réaction immunitaire de l'hôte contre la grippe avec des virus vaccinaux génétiquement modifiés qui ne bloquent plus la réponse innée, l'autre dans « Nature Communications » sur un vaccin ciblant des parties conservées de l'hémagglutinine, cette protéine de surface du virus hautement soumise aux mutations.
Des avancées
« Ce sont des avancées scientifiques importantes, estime le Pr Sylvie van der Werf, responsable du CNR des virus des infections respiratoires (dont la grippe) à l'Institut Pasteur. Les résultats précliniques sont prometteurs, il reste à maintenant savoir si on arrive à les traduire en pratique. Si l'on arrive à un vaccin efficace qui permet de s'affranchir du problème des variations antigéniques des virus de la grippe saisonnière et qui permet ainsi d'éviter la vaccination tous les ans, ce serait considérable. De là, à atteindre le Graal du vaccin unique contre toutes les souches du virus, je n'en suis pas totalement certaine. »
Pour Bruno Lina, les pistes n'ont pas fondamentalement changé contrairement à ce que les études ont pu suggérer. « Ce n'est pas un palier gigantesque, développe-t-il. Aucune piste ne ferme les autres, c'est une avancée à petits pas où la combinaison de plusieurs améliorations successives fera se rapprocher du vaccin universel. »
Les voies de recherche vers un vaccin amélioré vont dans plusieurs directions : de nouveaux épitopes plus performants, des cibles antigéniques plus conservées, l'utilisation d'adjuvants bien tolérés ou encore des vaccins plus concentrés en protéine immunisante.
Dans les nouveautés, la voie cofinancée par les Instituts nationaux de la santé américains (NIH) qui consiste à cibler une partie plus stable de l'hémagglutinine est sans doute la plus prometteuse, estime Bruno Lina. « Un essai clinique est en cours, indique-t-il. La mauvaise nouvelle, c'est qu'un autre travail à paraître prochainement montre que sous certaines conditions le virus peut échapper même avec des parties plus conservées. Le virus garde sa capacité à évoluer. »
Les pistes plus classiques restent donc de mise, notamment les adjuvants qui suscitent la polémique dans la population générale. « Un vaccin antigrippal avec adjuvant sera donné cet hiver aux sujets âgés dans certains pays d'Europe, comme l'Italie ou l'Allemagne », indique Bruno Lina.
La réponse vaccinale avec un adjuvant est meilleure, avec une protection plus intense, plus large, plus durable. « C'est un réel avantage pour les sujets âgés au système immunitaire vieillissant », indique Sylvie van der Werf. La piste d'un vaccin à haute dose est aussi bien avancée chez les personnes âgées. « Un dossier est sur le bureau de l'agence européenne, l'EMA », indique Bruno Lina.
Si les sujets âgés, à la fois à risque de grippe grave et moins bien protégés par le vaccin du fait de l'immunosénescence, font l'objet d'une attention particulière, « il est faux de dire qu'il est bénéfique pour les jeunes d'avoir la grippe, relève Bruno Lina. C'est vrai que l'immunité post-infectieuse dure dans le temps, bien plus longtemps que l'immunité postvaccinale. Mais c'est au prix de l'infection, les jeunes participent à la circulation du virus chez les personnes âgées. C'est une histoire collective ».
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