IL N’A PAS TOUJOURS été possible, comme c’est le cas aujourd’hui, de fractionner la propriété et l’exploitation d’une officine. Depuis la fin du XIXe siècle, au contraire, a longtemps prévalu le principe de l’indivisibilité de la propriété et de l’exploitation des pharmacies. Autrement dit, le pharmacien devait être propriétaire de l’officine dont il était titulaire et ne pouvait exploiter que cette seule officine. En vertu de ce principe, il était donc interdit de céder un fonds de pharmacie à une personne non diplômée, de mettre l’officine en location-gérance (c’est d’ailleurs toujours le cas aujourd’hui) et de démembrer la propriété du fonds.
Les choses ont ensuite changé progressivement puisque, à partir des années 1940, divers types de sociétés ont été autorisés dans la profession. Sont ainsi apparues, en 1941, les sociétés en nom collectif (SNC), en 1948, les SARL, puis, en 1985, les entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL) et, en 1990, les sociétés d’exercice libéral (SEL), avec la loi du 31 décembre de cette même année. Les deux dernières étapes avant le décret du 4 juin 2013 furent finalement la création des SEL par actions simplifiées (SELAS), en 2001, et la parution, le 31 décembre 2001, de la loi MURCEF sur les SPFPL.
« Il faut également relever, dans ce lent processus historique, le très important arrêt de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) de 2009, selon lequel la possession d’une officine peut être limitée aux seuls pharmaciens pour les pays qui le souhaitent », précise Jean-Jacques Zambrowski.
Des SEL aux SPFPL.
Aujourd’hui, le cadre législatif des SEL et des SPFPL est donc en place. Pour les SEL, la loi du 31 décembre 1990 prévoit que les associés ou actionnaires exploitants doivent représenter dans la société plus de la moitié du capital et des droits de vote - sauf le cas de SPFPL -, et qu’ils doivent détenir chacun au moins 5 % du capital. Quant aux associés ou actionnaires non exploitants, représentant donc moins de la moitié du capital social et des droits de vote, il peut s’agir de personnes physiques ou morales exerçant l’activité de pharmacien - ou d’une SPFPL -, pour une durée dix ans au maximum, d’anciens associés ayant cessé toute activité dans la société, et pendant un délai de cinq ans après le décès des ayants droit des personnes précédentes.
Autre point à retenir : l’article R5125-18 du Code de la santé publique prévoit qu’une SEL exploitant une officine ne peut détenir de parts ou d’actions que dans deux autres SEL exploitant une pharmacie. Un titulaire, pour sa part, peut avoir deux participations dans deux SEL autres que la sienne.
Comment s’établit ensuite le lien entre les SEL et les SPFPL ? De la façon suivante : par dérogation aux règles de détention du capital ci-dessus, l’article 5-1 de la loi de 1990 sur les SEL prévoit que plus de la moitié du capital des SEL peut aussi être détenue par des sociétés de participation financière de professions libérales. C’est ainsi que la loi de 1990 a ouvert la porte à la création de SPFPL, ou holdings.
À noter également que c’est cette même loi qui a permis de dissocier le capital et les droits de vote dans les SELAS.
Les holdings aujourd’hui.
Pour que les holdings de pharmacie soient applicables, il aura fallu attendre encore… vingt-trois ans après la loi de 1990 et douze ans après la loi MURCEF. En 2002, pour faire accélérer les choses, le Conseil d’État a enjoint le gouvernement à se prononcer dans un délai de six mois sur la nécessité d’édicter ou non un décret sur les holdings, puisque, faute d’un tel texte, les holdings ne pouvaient véritablement entrer en vigueur.
Ce fameux décret, on le sait, n’est paru finalement que le 4 juin 2013. Mais au moins est-il clair sur de nombreux points. Notamment, il prévoit que le capital des SPFPL de pharmaciens d’officine n’est ouvert qu’à des pharmaciens d’officine en exercice, d’anciens pharmaciens pendant dix ans ou aux ayants droit de ces personnes pendant cinq ans à compter du décès. Une disposition bienvenue par ailleurs : comme les titulaires ou les SEL de pharmaciens, les adjoints exerçant en officine sont habilités eux aussi à constituer une SPFPL.
Autre précision : une SPFPL peut prendre des participations dans trois SEL au maximum, et un pharmacien peut prendre des participations dans quatre SEL, en plus de celle dans laquelle il exerce.
Enfin, mais cela était déjà prévu par la loi de 1990, une SPFPL peut avoir des activités accessoires en relation directe avec son objet et au profit de ses filiales : elle peut donc facturer des prestations de services à la SEL.
« Au total, la holding est à la fois un outil d’organisation, mais aussi un outil d’acquisition des parts, un moyen d’intégrer un nouvel associé ou de reprendre des parts, et un vecteur de réinvestissement », conclut Jean-Jacques Zambrowski.
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