Le Quotidien du pharmacien. - Élu président de la République, garantirez-vous les fondamentaux de l’officine ?
Éric Zemmour. - La pharmacie est aux yeux de toutes les Françaises et de tous les Français un lieu de conseil, de partage et de service rendu aux patients en termes de santé publique. Le monopole pharmaceutique doit être maintenu et protégé. En effet les pharmaciens sont responsables de la délivrance des médicaments en fonction de la pathologie des patients et ils sont les seuls qui peuvent garantir cette sécurité. Les docteurs en pharmacie doivent être les seuls à détenir le capital des officines, la marchandisation de la santé entraîne des dérives commerciales qui ne sont pas compatibles avec la mission pharmaceutique.
Il est très dangereux de vendre en ligne des médicaments car aucun contrôle effectif de la prescription ne peut être réalisé. De plus qui endosse la responsabilité de la délivrance quand elle est faite à distance ? Des filières de faux médicaments et des réseaux de trafic de médicaments ont été démantelés, nous sommes donc contre la vente de médicaments en ligne. Une directive européenne récente assouplit la publicité en précisant qu'elle ne doit consister uniquement en « l’information » pour le patient, pour « l’éclairer ». Cette information doit être loyale, discrète et non concurrentielle.
Comptez-vous pérenniser et étendre les rôles confiés aux pharmaciens pendant la pandémie ?
Les pharmaciens tout au long de la pandémie ont prouvé leur dévouement en distribuant gratuitement aux soignants des EPI (équipements de protection individuelle NDLR) et en organisant, avec efficacité, une juste répartition des moyens de détection et de traitement du Covid-19 malgré les dysfonctionnements des ARS. Les pharmaciens ont été et sont l’un des acteurs de santé incontournables et il est tout à fait normal que cela soit reconnu par une rémunération forfaitaire lors de missions de santé publique, ce qui n’a pas toujours été le cas quand les grandes surfaces avaient le droit de vendre des masques alors que les pharmaciens devaient les distribuer gratuitement…
Pensez-vous restructurer l’organisation des soins et de la santé dans les territoires, notamment en réformant les ARS ?
Nous avons l’intention de supprimer les ARS qui ont largement prouvé leur totale inefficacité depuis le début de la crise sanitaire, servant de boîte aux lettres au ministère sans grandes initiatives et ne faisant que rapporter les directives nationales au détriment des professionnels en retardant les prises de décisions… Nous voulons redonner aux préfets départementaux et régionaux, en totale concertation avec les représentants des professionnels, le pouvoir de gérer les différents échelons de la santé. Un gain de temps notable qui permettra d'augmenter l'efficacité et, en étant au plus proche du terrain, de répondre aux problèmes spécifiques rencontrés.
Dans le domaine de l’interprofessionnalité, prévoyez-vous une simplification de l’exercice coordonné et des incitations financière plus conséquentes ?
Il est primordial dans l’intérêt des patients d’améliorer l’interprofessionnalité. L’exercice coordonné peut être amélioré par le partage des données entre professionnels de santé, que ce soit directement ou au moyen du numérique. Il est sûr que dans certaines zones sous-dotées les implantations sont plus difficiles et l’incitation à l’installation au travers d’aides et de diminution, voire d'exonération de certaines charges, peut aider certains pharmaciens à créer une officine et à la pérenniser.
Un pharmacien a plus de chances de voir son exercice perdurer si des confrères médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, infirmières, kinésithérapeutes… viennent s’installer non loin de son officine, c’est pour cela que nous mettrons en place le même type d’aides d’incitation à l’installation et d’exonérations.
Le déploiement du numérique en santé sera-t-il poursuivi sous votre mandat ?
Nous continuerons de généraliser « Mon espace santé », consécutif au DMP, qui permet des échanges entre soignants, en revanche nous serons très vigilants quant aux hébergeurs des datas. Le secret professionnel doit être strictement respecté, car il fait partie des libertés individuelles. La téléconsultation doit être améliorée et permettre aux acteurs de santé de pouvoir transmettre des images ou des vidéos à des spécialistes pour faciliter une prise en charge plus rapide des patients, surtout dans les zones désertifiées. Les pharmaciens pourront bien entendu être partie prenante dans ce type d’acte. La e-prescription est elle aussi un moyen numérique qui permet au prescripteur et au pharmacien de travailler étroitement et d’accélérer la délivrance de médicaments aux patients. Il faut qu’elle soit sécurisée, notamment dans le respect du RGPD. Le carnet vaccinal permet de savoir où le patient en est de ses vaccinations. À la différence du passe vaccinal qui n’a pas la même finalité. Il entraîne des restrictions aux libertés individuelles, et les dispositions qui ont été prises n’ont pas toujours été à bon escient. Par conséquent, nous supprimerons le passe vaccinal.
Que comptez-vous faire pour que la France joue à nouveau dans le concert des nations innovantes en matière de médicaments, d’essais cliniques, de R & D, d’investissements industriels et de relocalisation ?
La France, en matière de recherche et innovation du médicament, est passée du premier rang européen au 4e en l’espace de 15 ans, les délais pour réaliser une recherche, faire des essais cliniques, et attendre l’AMM sont les plus importants d’Europe. Les charges et taxes dans l’entreprise dans ce secteur sont intolérables et insupportables pour l’entreprise. Une concurrence déloyale s’est peu à peu installée entre les différents pays industrialisés et nos produits finis ont un coût de revient plus cher que dans les autres. L’industrie du médicament et des produits de la santé emploie plus de 100 000 salariés, avec plus de 57 % de femmes, nous voulons dès les premiers mois qui vont suivre les élections simplifier les démarches administratives des entreprises, particulièrement dans cette spécialité, détaxer les industries de santé, de façon à inciter les dirigeants à rapatrier la fabrication des médicaments en France.
L’autonomie sanitaire est l'une des priorités de la politique de santé. Désormais, il n’est plus question d’être tributaire du bon vouloir de la Chine, du Pakistan ou de l’Inde en ce qui concerne les molécules nécessaires à la survie des patients. Il en est de même pour la fabrication des EPI. Nous avons pu voir dans quel désespoir a été plongé le pays dès le début de la pandémie alors que de très nombreuses sonnettes d’alarme avaient été tirées bien auparavant. Nous avons la chance d’avoir en France les meilleurs chercheurs au monde, qui sont obligés de fuir pour pouvoir mettre en application leurs études et leurs process car les gouvernants précédents n’ont pas voulu leur donner les moyens, ni leur proposer des salaires en adéquation avec leur formation et leurs responsabilités.
Alors, oui, nous ferons tout ce qui nous est possible pour développer et aider la recherche française en investissant massivement dans ce secteur. Nous favoriserons un partenariat public-privé (PPP), des secteurs qui se doivent d’être complémentaires, en détaxant les industriels en santé, pour non seulement permettre à ceux qui sont encore sur notre sol de rester mais en plus attirer ceux qui en sont partis ou ceux qui ne sont jamais venus travailler en France.
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