NOUVELLISTE patenté en même temps que romancier – prix Renaudot pour « la Faculté des songes?–, Georges-Olivier Châteaureynaud s’est fixé, pour son nouveau livre «?Résidence dernière » (1), un thème littéraire : les résidences d’écrivain. Des havres de paix, croit-on, propices à l’épanouissement du talent et à la production de magnifiques écrits. Las ! La réalité de Georges-Olivier Châteaureynaud est tout autre. Entre réalisme et fantastique, ses trois nouvelles sont un questionnement sur la condition de l’auteur, une sorte de mise à nu sans qu’il en
paraisse. L’une amène le narrateur dans le donjon d’un château médiéval perdu dans une ville balnéaire désertée, avec la mer comme seul miroir tourmenté de lui-même. La deuxième conduit un jeune loup, sûr de lui et de son talent, dans un manoir habité par un vieillard ; la nuit, surgie d’un grand miroir, se matérialise la femme rêvée – comme la concrétisation de son travail d’écriture. La nouvelle éponyme, enfin, charrie un car d’écrivains déjà connus et parfois reconnus dans une sorte de no man’s land où la plupart sont carrément éjectés, les autres conduits dans une sorte de camp-purgatoire où ils subissent la faim, le froid et l’ennui jusqu’au moment où ils sont statufiés, pour de vrai et de leur vivant !
Une passion intellectuelle
Avec « Noir souci » (2), René de Ceccatty nous ramène à une réalité qui est la porte même d’une rêverie sans bornes. Romancier et auteur de biographies, dont celles de Maria Callas et Alberto Moravia, il raconte l’amitié, ou plutôt la passion intellectuelle et non charnelle, qui a uni, au cœur du XIXe siècle, en Italie, deux êtres totalement opposés. L’un est le célèbre philosophe et poète Giacomo Leopardi, l’autre un jeune révolutionnaire napolitain en cavale, Antonio Ranieri. Lorsqu’ils se rencontrent, Leopardi a à peine plus de 30 ans mais il est déjà malade et ne voit presque plus ; de dix ans son cadet, Ranieri est le propre du jeune homme fougueux à qui personne, aucune femme, ne résiste. Pour fuir les conflits avec leur famille, ils quittent Florence pour s’installer à Naples, où les attend le choléra.
Littérature et érotisme, même combat
Écrivain prolixe, auteur d’une soixantaine d’ouvrages, depuis « Quintes », en 1963, Marcel Moreau, 78 ans, signe « la Violencelliste » (3), « le testament d’un écrivain et grand lecteur, pour qui le livre et le corps, la littérature et l’érotisme ne font qu’un ». Tout est dit dans cette phrase de ce roman-essai où l’auteur, sous forme de « lettre à un jeune corps n’aimant pas lire et en grand danger de mort dans l’âme », à la fois retrace son histoire d’écrivain et de lecteur entièrement voué au rythme de la langue et exhorte chacun, même ceux qui ont renoncé à lire, à malgré tout écrire dans un même élan et accord du ventre et de la tête.
Sus à l’erreur
Le narrateur du roman de Ricardo Menendez Salmon n’est pas un écrivain ; pire, il est un écrivain raté qui gagne sa vie en corrigeant les fautes des autres. Pourtant, c’est bien le rôle de l’écrivain dans la société actuelle que cet auteur espagnol se plaît à mettre en avant dans « le Correcteur » (4). Lorsque, après les attentats dans des trains de banlieue à Madrid, le 11 mars 2004, qui feront 191 morts, tout le monde, son éditeur, sa famille, son ami et même le gouvernement, accuse l’ETA (on apprendra plus tard que José Maria Aznar a menti)?; lui est persuadé que cela ne colle pas. Les détails ne concordent pas, et un littéraire, contrairement à un politique, sait que la vérité se cache dans les détails. Mais peut-on traquer dans la vraie vie et comme dans un texte cette petite erreur, cette petite coquille qui cherche à passer inaperçue, ou est-on obligé d’admettre que parfois on est impuissant contre « une erreur ineffaçable inscrite sur le livre de la réalité » ?
Dans les coulisses de la presse.
La presse est aussi le personnage principal du premier roman de l’Anglais Tom Rachman, « les Imperfectionnistes » (5). Ou plutôt, s’appuyant sur un milieu qu’il connaît parfaitement puisqu’il est lui-même journaliste, l’auteur s’est plu à brosser les portraits de 11 personnes qui gravitent plus ou moins dans la salle de rédaction d’un journal. La mise en garde «?Toute ressemblance... » n’est pas nécessaire, puisque, si Tom Rachman est actuellement en poste à la rédaction de l’« International Herald Tribune », à Paris, il a situé son récit dans un quotidien anonyme à Rome. Il ne donne pas de leçon sur la presse et son éthique, mais présente des hommes et des femmes qui doivent composer entre ce qu’ils sont et ce qu’ils font. Du plus grand?– le très incapable directeur de la publication, petit-fils de l’énigmatique fondateur du journal?– au plus petit un pigiste débutant?–, ils avancent tous cahin-caha, entre le rire et les larmes.
(2) Flammarion, 265 p., 19 euros.
(3) Denoël, 184 p., 16 euros.
(4) Jacqueline Chambon, 120 p., 16 euros.
(5) Grasset, 388 p., 20 euros.
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